Prince de la Paix (Isaïe, 6-12)

M Jacques CAZEAUX
La paix - n°257 Mai - Aout 2018 - Page n° 19

L’expression « prince de la paix » que l’on trouve chez Isaïe doit être lue dans le contexte de 1 Samuel 8 qui énonce la charte du roi pervers, Achaz. Le prince de paix eschatologique manifeste l’iniquité des rois. Par conséquent, l’attribution à Jésus du titre de « prince de paix » doit se lire comme l’annonce d’une miséricorde donnée à ceux qui ont adoré la paix promise par les rois terrestres, satisfaisant la volonté de puissance de leurs sujets.

 

Parfois appliquée à Jésus, cette expression d’Isaïe est unique, et elle ne figure pas telle quelle dans le Nouveau Testament, même si Paul, les évangiles et les épîtres parlent de la paix, Jean abondamment1. Comme tous les « mots » célèbres que la petite histoire et parfois l’Histoire se plaisent à colporter, hors contexte ou plutôt insérés dans un contexte minuscule tel un écrin2, Prince de paix court le risque de toutes les projections subjectives et fermées. Bien remis en son « lieu », ce titre ouvre au contraire sur le paysage entier des Écritures, au mystère de ce que nous appelons d’un mot trop simple en français, le « salut », le salut des Nations par le salut d’Israël. Pour commencer, il invite précisément à parler de Jésus dans l’idiome qui fut celui de son destin, les Écritures d’Israël et, ici, à la lumière d’une des premières pages du prophète Isaïe, c’est-à-dire du formidable Cahier des trois grands prophètes. Par là, déjà, il évite au fidèle de se fixer sur le seul personnage de Jésus, le Fils, pour remonter avec lui au Père.

Le beau et redoutable contexte : Isaïe, chapitres 6 à 12

Paul Claudel aimait ces génitifs à valeur de nos adjectifs qui émaillent les Écritures, tels que Fils de lumière, qui veut dire « Figure éclatante ». Ici « pacifique » pourrait traduire platement de paix, mais, ne fût-ce que pour profiter par l’oreille du style hébraïque de nos Écritures, gardons le titre de noblesse, Prince de paix. Gardons également son terreau, sa traîne, sa prophétie entière. Le mot n’est pas isolé. Il se trouve au cœur d’un redoutable chef-d’œuvre, le « Livret de l’Emmanuel » (Isaïe, chapitres 6 à 12). Ces quelques pages, qui soufflent le chaud et le froid, ont pour occasion la condamnation exemplaire du roi Achaz. Ce roi de Juda tremble devant [...]

 

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1  Michée 5, 4, ou Zacharie 9,10, frôlent l’oracle d’Isaïe, et de même le Psaume 72 (mais la transposition eschatologique, de la royauté y est déjà faite, appliquant les valeurs du Prince idéal d’Isaïe à un « Roi » idéal). L’Apocalypse 1, 5 parle simplement du Christ comme Prince des rois de la terre, citation de plusieurs passages des Écritures. L’Épître aux Hébreux évoque Melchisédeq, soit roi de justice, et dont le nom, roi de Salem, se traduit « roi de paix » (7, 2) : une exégèse précise de ces formules aboutirait aux mêmes réalités ruineuses pour Jérusalem et ses rois que celles de l’oracle d’Isaïe, mais les termes de départ, « roi » et « prince », ne sont donc pas les mêmes, et les voies seraient différentes…

2  Un exemple célèbre de surcharge et de fortune indue, provoquant les théories des deux glaives : « Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu ».


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