L'énigme du fait religieux

Peut-on prétendre enseigner le « fait religieux » en évitant d'envisager le contenu d'expérience qui fait le monde des croyants ? C'est en faisant une place réelle à la question du sens, que l'école laïque pourra trouver des réponses à cette question.

L'actualité pousse, au nom même de la laïcité, à réévaluer certains effets de la laïcité sur les contenus d’enseignement de l’école et y favoriser l’insertion de la culture religieuse, puisque elle a par nature une vocation culturelle. Il semble qu’on ait compris que l’enseignement, dans sa dimension la plus universelle, ne pouvait pas omettre des contenus d’enseignement religieux requis pour accéder à l’essentiel de notre héritage historique – que ses formes soient littéraires, picturales, architecturales ou autres. Pourtant, cette demande d’une culture religieuse, pour autant qu’elle serait bien comprise et conforme à ses fins – permettre à tout un chacun d’accéder à la teneur spirituelle des contenus culturels que nous transmettent l’histoire et l’éducation qui nous l’apprend – nous paraît irréductible au seul réquisit d’un « minimum culturel » en matière religieuse qui serait constitué du catalogue des « croyances » des uns et des autres. Comment, en effet, faire entendre aux enfants qui ignorent tout du christianisme ce dont il s’agit devant le tableau d’une crucifixion, si l’on se contente de la restitution crue d’un récit historique factuel – un homme qui s’est dit le Fils de Dieu est  mis à mort –, ce qui revient au fond à écrire par avance l’histoire et l’instruction du point de vue des « Lumières », c’est-à-dire à suggérer qu’il y va dans tout cela d’une vulgaire superstition ? Les chrétiens eux-mêmes n’ont-ils pas à assumer la folie de la croix pour faire grief à ceux qui l’ignorent d’y voir la folie d’une croyance ? [...]