Lacordaire et son discours sur la vocation de la nation française (1841).

Dans une prédication de 1841, symbolique puisqu'elle marque le retour de l'ordre dominicain, supprimé depuis un demi-siècle en France, Lacordaire, dans un survol cavalier de l'histoire de France, où Clovis se trouve en bonne place, propose en fait à l'Église comme au monde bourgeois du XIXè siècle une réconciliation.

Si, au XIXe siècle, quelqu'un a eu le sens de l'opinion publique, et presque avant tout le monde, c'est bien Lacordaire. Avocat, avant sa conversion, puis prêtre, journaliste et enfin brillant orateur, il a su trouver les mots, le style, le ton qui lui attirèrent des centaines d'auditeurs lorsqu'il montait en chaire. Après l'aventure de l'Avenir dans laquelle il tint un rôle déterminant avec Lamennais et le jeune Montalembert, en 1830 et 1831, l'abbé Henri Lacordaire se soumet sans hésitation ni arrière-pensée au Siège de Pierre, sans pour autant abandonner son libéralisme qui consiste essentiellement à vouloir réconcilier l'Église et la société issue de la Révolution française. Revenu à Paris, il obtient un grand succès avec ses conférences apologétiques aux jeunes gens, au Collège Stanislas d'abord, puis dans la chaire de Notre-Dame que l'archevêque de Paris, Mgr de Quelen, pourtant légitimiste bon teint, lui offre en 1835 et 1836.

Sentant le besoin d'une pause, faute de voir son inspiration théologique s'essouffler, Lacordaire se retire à Rome pour une sorte de retraite studieuse. C'est là qu'il va concevoir le grand dessein de restaurer en France l'ordre des  dominicains, disparu avec la Révolution française et resté illégal depuis lors comme toutes les congrégations non autorisées. Alors qu'au même  moment, l'abbé Prosper Guéranger choisit la plus grande discrétion pour relever le monastère de Solesmes, au contraire Lacordaire fonce bille en tête et prend à partie l'opinion publique française. [...]