Christianisme et culture. Réflexions sur la notion d'hégémonie culturelle

Si la richesse de la civilisation chrétienne au Vè siècle a sans doute joué un rôle dans la conversion de Clovis, l'hégémonie qu'elle a longtemps exercée est atteinte de plein fouet par la déchristianisation de la société moderne. C'est un défi pour les chrétiens qui doivent faire taire leurs divisions s'ils veulent redonner à la pensée chrétienne sa capacité d'intégrer les valeurs du monde.

Quand on évoque le baptême de Clovis et de ses 3 000 guerriers, on ne peut pas ne pas se dire que les conversions paraissent avoir été faciles en ce temps-la! La facilité allant de pair sans doute avec le caractère superficiel, comme l'atteste la suite de l'histoire des Mérovingiens, remplie de cruautés et d'horreurs fratricides (lesquelles n'ont guère à envier d'ailleurs à celles qui advinrent dans la famille de Constantin le Grand et qui contribuèrent à éloigner du christianisme un Julien).

Pour expliquer la conversion des Francs, l'historiographie traditionnelle évoque la bataille de Tolbiac où Clovis prit l'engagement de se faire baptiser quand le sort des armes tourna en sa faveur. A supposer qu'ils accordent quelque crédit à cet épisode, les esprits sceptiques ne manquent pas d'y voir la preuve du caractère primitif de la foi de Clovis, tout empreinte de superstition et en définitive peu digne d'être prise au sérieux. D'autres historiens ont ensuite insisté sur le calcul politique qui se trouve à l'origine de la conversion de Clovis : désireux de consolider son emprise sur la Gaule et de trouver l'appui de 'élite gallo-romaine contre les autres tribus germaniques gagnées à l'arianisme (Wisigoths, Ostrogoths, Burgondes) ou demeurées païennes (Mamans), le roi franc se convertit au catholicisme car cela doit lui valoir les faveurs des évêques de Gaule, acquis à l'orthodoxie et très influents auprès des populations locales. Ce genre de considérations fait plus sérieux pour un esprit positif mais ne donne pas davantage de crédibilité à la foi de Clovis. [...]

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