L’exégèse est-elle une science théologique ?

Père Florent URFELS
L'exégèse canonique - n°265 Septembre - Octobre 2019 - Page n° 87

Citant la Constitution Dogmatique Dei Verbum, le n° 34 de l’exhortation post-synodale Verbum Domini propose trois critères permettant d’évaluer la manière dont une exégèse biblique catholique peut parvenir, au-delà d’une étude technique des textes bibliques, à en proposer une herméneutique théologique : « 1) interpréter le texte en tenant compte de l’unité de l’ensemble de l’Écriture ; 2) tenir compte ensuite de la Tradition vivante de toute l'Église, 3) respecter enfin l’analogie de la foi ». Florent Urfels analyse la manière dont l’exégèse biblique contemporaine honore chacun de ces critères, et invite à développer une réflexion herméneutique qui permette de mieux élucider la manière dont les Traditions bibliques proposent une théologie de l’histoire.

 

Verbum Domini pose un constat sévère sur la valeur théologique de l’exégèse biblique contemporaine : « Alors que l’exégèse académique actuelle, y compris catholique, travaille à un haut niveau sur le plan de la méthodologie historico-critique en intégrant les apports les plus récents, on ne peut pas en dire autant pour ce qui concerne l’étude de la dimension théologique des textes bibliques » (n° 34). Dit autrement, les pères synodaux reconnaissent et saluent les efforts consentis par la science biblique pour se hisser au niveau d’une discipline rigoureuse et objective au plan de l’histoire des textes. Ce n’est qu’au prix de cet effort séculaire – mentionnons à titre de mémorial le Père Marie-Joseph Lagrange (1855-1938), la fondation de l’École Biblique de Jérusalem (1890) et celle de l’Institut Biblique de Rome (1909) – que le catholicisme a pu se désenclaver d’une approche quelque peu fidéiste des Écritures Saintes, en réaction à l’exégèse protestante libérale d’un Harnack comme au modernisme d’un Loisy. Cependant, en s’accoutumant aux méthodes historiques utilisées par l’herméneutique générale des textes anciens, selon les recommandations du Magistère (très prudentes encore en 1893 dans Providentissimus Deus ; plus franches en 1943 et 1965 avec Divino afflante spiritu et Dei Verbum), l’exégèse catholique s’est d’autant éloignée de la théologie comme science de la foi. Et c’est bien cet éloignement qui pose problème.

Il vaut la peine d’évaluer plus en détail la pertinence du jugement synodal. Est-il si vrai que « l’approfondissement théologique [des textes bibliques] selon les trois éléments indiqués par la Constitution dogmatique Dei Verbum semble, trop souvent, presque absent » ? Ces trois éléments en question, Verbum Domini les extrait d’une assertion conciliaire plutôt dense.

Puisque la Sainte Écriture doit être lue et interprétée à la lumière du même Esprit que celui qui la fit rédiger, il ne faut pas, pour découvrir exactement le sens des textes sacrés, porter une moindre attention au contenu et à l’unité de toute l’Écriture, eu égard à la Tradition vivante de toute l’Église et à l’analogie de la foi (Dei Verbum, 12). Il s’agit donc, pour les exégètes catholiques, de mobiliser trois critères herméneutiques :

 

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