Arte entre connaissance historique et idéologie

Dans la série présentée par Arte, «L'origine du christianisme », la visée idéologique ressort du montage, avec cette idée force que le christianisme s'est approprié le judaïsme. La référence au livre « Jésus après Jésus » permet de juger la méthode adoptée : au lieu d'une histoire des origines à travers des textes fondateurs, une démarche historiographique qui, mise à l'épreuve des faits, ne résiste pas à la révision rigoureuse qu'en donne l'article.

La série présentée en mars-avril dernier sur Arte par Gérard Mordillat et Jérôme Prieur, L’origine du christianisme, ne cesse de susciter admiration pour la filmographie, intérêt et sympathie pour une entreprise courageuse, qui présente à un large public des textes et des problématiques difficiles, désarroi et polémique quant à la visée de cette série. Pour prendre la mesure des débats, il faut se référer au livre qui a précédé de peu la première émission, Jésus après Jésus 1 Les deux auteurs utilisent les interventions des chercheurs qu’ils ont interrogés pour construire une démonstration qui leur est propre, cette fois, et surtout ils explicitent leur méthodologie et leur conception de l’histoire.

Dans la série télévisée, où chacun des chercheurs présente évidemment un point de vue qui lui est personnel, la visée idéologique ressort du montage, qui culmine dans l’épisode final du Verus Israel, avec l’idée-force que le christianisme s’est approprié le judaïsme en le dépossédant de ses Écritures et de son statut, en le « chassant de sa maison » (Moshe-David Herr), et que l’antisémitisme trouve sa source dans l’image déformée d’un « Juif imaginaire » qu’ont diffusée les premiers chrétiens (Emmanuelle Main). Ces interventions finales tranchent évidemment avec les propos nuancés d’un certain nombre d’exégètes et de chercheurs, mais elles n’en constituent pas moins un point d’orgue. [...]