Honorer les morts – Cérémonies, sépultures et monuments de la Grande Guerre (1914-année 1930)

Laurent JALABERT
La religion des tranchées - n°247 Septembre - Décembre 2016 - Page n° 127

Aux morts pour la patrie, il faut des sépultures décentes, des monuments sur des corps et non des cendres. Aussi bien l’armée que les familles se retrouvent dans ce culte dont les cérémonies, indissolublement religieuses et patriotique sont un besoin et un devoir, pour les camarades survivants comme pour les proches qui ne peuvent se rendre sur la tombe, collective ou individuelle. L’après-guerre voit le culte des morts envahir tout le territoire.

 

« Savoir, qu’en attendant le jour de la glorieuse résurrection, son corps sera entouré de respect, de vénération ; que de pieuses mains remplaceront des mains maternelles pour fleurir sa tombe… ; que, s’il repose loin du foyer, il repose dans une autre famille qui l’a adopté comme un fils parce qu’il est mort en défendant son clocher, son sol natal et ses demeures familiales ! ! ! C’est, pour le soldat, une source de force et de courage1 ». 

Avec la Grande Guerre, l’honneur fait aux morts de la patrie achève une mutation entreprise tout au long du XIXe siècle, mêlant reconnaissance du sacrifice guerrier par l’État, l’armée, la religion et la société civile. Au centre des changements se trouve certes le soldat, plus particulièrement l’individu, identifiable, et bénéficiant d’une sépulture individuelle au terme de changements progressifs. L’honneur conféré aux morts militaires doit se lire avec l’évolution de l’ensemble de la société civile dans son rapport à la mort aux xixe-xxe siècles : l’anonymat et l’oubli n’étaient plus acceptables, notamment pour des soldats tombés au service de la nation. Cette dynamique, lisible en Europe dès les guerres de la révolution, n’a pas manqué de s’affirmer outre-Atlantique avant de s’exprimer progressivement en Europe au cours de la seconde moitié du xixe siècle : les guerres de Crimée, d’Italie, austro-prussienne et franco-allemande constituent toutes des étapes et des révélateurs des nouvelles modalités du respect des morts pour la patrie. Ainsi, la loi du 29 décembre 1915 qui ancre l’honneur dû aux soldats par la nation française dans l’espace –  une tombe individuelle – et dans le temps, avec l’affirmation de la perpétuité de la sépulture, n’est que l’expression d’un processus double : celui évoqué plus haut pour le xixe siècle et celui lié au contexte propre à la Première Guerre mondiale elle-même. En effet, ce sont bien les conditions de la guerre – mobilisation générale, mort de masse, disparition des corps – qui jouent en faveur d’une dynamique de groupe destinée à rendre hommage aux soldats tombés, à ne pas les oublier [...]

 

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1 Propos de l’abbé Lefèvre, aumônier de la 77e division lors d’une cérémonie anniversaire des combats de la Mortagne, le 27 août 1918 (cité dans d’Alphonse Collé, La bataille de la Mortagne. La Chipotte, l’occupation, Ménil et ses environs, Paris, Librairie Emmanuel Vitte, collection La guerre de 1914. – Les récits des témoins, 1925, p. 178). 


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