Quelques remarques sur la théologie de l’histoire chez Jean Daniélou

Tobias MAYER
Le concile de Nicée - n°296 Novembre - Décembre 2024 - Page n° 111

Quelques remarques sur la théologie de l’histoire chez Jean Daniélou

Le discours sur le « mystère de l’histoire » nous est devenu aujourd’hui étranger : le concept d’« histoire » est trop grand et trop puissant, et la prétention de pouvoir en définir le sens est trop audacieuse. Celui qui s’interroge sur le « mystère » présuppose qu’il existe un principe interne de l’histoire ou une logique à découvrir. Même en théologie, cette approche n’est plus à la mode désormais, car on perçoit la factualité historique avant tout sous le signe de la contingence : les choses sont ce qu’elles sont − bien sûr, tout pourrait être très différent. La question de la justice de Dieu face à l’injustice flagrante de l’histoire a également rendu problématiques les concepts de conduite et de providence divines. Que Dieu soit le maître de l’histoire − cette idée a en tout cas perdu son évidence.

L’approche de l’histoire du salut chez Jean Daniélou

La situation était différente pour la génération de théologiens comme Jean Daniélou. La question du « sens de l’histoire » était une des questions philosophiques et théologiques les plus importantes de l’après-guerre, comme le décrit Daniélou 1. L’étude du philosophe allemand Karl Löwith, Histoire et salut. Les Présupposés théologiques de la philosophie de l’histoire 2, est devenue légendaire. Il y décrit de manière concise comment la théologie chrétienne se réfère au déroulement de l’histoire comme à une succession d’événements à caractère salvifique. Il est toutefois remarquable de constater combien l’intention critique de Löwith est souvent passée sous silence dans sa réception : Löwith a certes démasqué l’hybris de la philosophie moderne de l’histoire en tant que simple théologie sécularisée de l’histoire. Mais pour lui, ce n’est pas seulement la philosophie moderne de l’histoire, avec son penchant pour l’idéologie et le totalitarisme, qui est absurde ; il considère également comme illégitime la référence théologique à l’histoire...


 1 Voir J. DANIÉLOU, « Les orientations présentes de la pensée religieuse », Études 249 (1946), p. 5-21, (re-publié dans Communio no 295, XLIX, 5 septembre- octobre 2024, pp. 27 sv.).

 2 K. LÖWITH, Weltgeschichte und Heilsgeschehen. Die theologischen Voraussetzungen der Geschichtsphilosophie (1re éd. en anglais : Meaning in History : The Theological Implications of the Philosophy of History, Chicago, 1949 ; puis en allemand, Stuttgart 1953 ; trad. fr. Histoire et salut. Les Présupposés théologiques de la philosophie de l’histoire, Gallimard, 2002).


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