La boussole de Darwin ou le chant de la création

L'évolution est vraie. Ce qui pose question, c'est une interprétation du darwinisme qui fait des êtres humains de simples accidents, dans un processus ouvert et indéterminé. Or l'étude même de l'évolution contredit cette idée : le progrès des espèces et l'émergence d'états complexes irréversibles sont bien réels. Ceci peut nous éclairer sur la définition et l'émergence de l'humain et offre un grand intérêt théologique. Ce n'est pas la science mais le scientisme qui s'oppose à la religion. La science révèle des profondeurs inattendues dans la Création, et la religion nous indique quelle attitude avoir à cet égard.

Chesterton disait que tant qu’à faire de prêcher, mieux valait prêcher aux convertis¹, car ce sont eux qui couraient le risque – qu’ils courent aujourd’hui plus que jamais – de remplacer une foi mal connue par un vague charabia gnostico-syncrétiste. Chesterton avait comme toujours raison, et si l’on pense qu’il ne s’agit que d’un paradoxe exaspérant de plus de sa part, il faut le relire : sa prescience de notre situation actuelle, et, pire, de la direction que nous prenons, est stupéfiante. Certains trouveront étrange d’invoquer son nom au début d’une conférence consacrée au débat entre la science et la religion. Mais il est simpliste de considérer que Chesterton était hostile à la science² : ce qui l’alarmait profondément, ce n’était pas la science, mais le mauvais usage qu’on pouvait en faire. Bien d’autres avant lui, par exemple Robert Boyle, avaient déjà vu le danger du manque de scrupule en ce domaine, quand ignorance et orgueil démesuré se mettent de la partie.

Où en est-on depuis le XVIIe siècle ? Curieusement, l’histoire paraît sur ce point plus tourner en rond qu’avancer. Qu’est-ce qui a vraiment changé ? Du vivant de Boyle, la science, malgré son état naissant, ouvrait déjà une perspective de connaissance sans limites,[...]

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a. NdT: le grand savant anglais du XVIIe siècle avait institué une leçon  annuelle qui devait défendre la vérité religieuse.

1. G. K. Chesterton, 1913, «An Accident », in Tremendous Trifles, Methuen, p. 31.

2. Voir S. L. Jaki, 1986, Chesterton, a Seer of Science, University of Illinois Press.