L'avenir de la paroisse, la paroisse de l'avenir

Intégration

  La paroisse reste le lieu privilégié où la majorité des catho­liques français rencontrent leur Eglise. Il s'agit ici d'esquis­ser les caractères de la foi populaire des années à venir, et d'indiquer les modifications et les élargissements de la paroisse qui devraient y correspondre.

La première page, 41, est jointe.

 LE Concile Vatican II a remis en honneur la notion biblique et théologique de « peuple de Dieu ». Celle-ci ne définit pas à elle seule l'Eglise de Jésus-Christ ; mais elle aide à en percevoir la dimension la plus large — en somme, un aspect de sa catholicité. Que veut-on dire en effet, dans le langage courant, quand on -parle de peu­ple ? Un peuple, ce n'est pas un groupe primaire dans lequel chaque indi­vidu peut avoir des rapports directs avec tous les autres ; ce n'est pas non plus un groupe secondaire fermé (une « secte »), dont tous les membres ont un comportement unanimiste, le non-conformisme en étant exclu ou s'en excluant lui-même.

Un peuple, c'est un groupe secondaire ouvert dont les membres peu­vent avoir des comportements très différents les uns ^.des autres, mais vivent des solidarités importantes : une histoire, des coutumes, sinon des institutions communes, un destin commun. Cette communauté large et souple n'est pas nécessairement circonscrite à un territoire : ainsi, la diaspora juive est restée un peuple, parce qu'elle avait le senti­ment de posséder en commun une tradition vivante, c'est-à-dire un patri­moine culturel et religieux susceptible d'évoluer, mais conforme pour l'essentiel à son histoire.

On voit bien ce qu'est une tradition vivante : au minimum, un désir de continuité, mais aussi d'adaptation le plus souvent lente et progres­sive ; pas nécessairement un savoir que chacun serait censé posséder,  (p.41) mais un attachement à des racines ; une adhérence sociale plutôt qu'une adhésion « conscientisée ». Elle est transmise par un ouï-dire et un voir-faire plus que par un enseignement.

Il est plus difficile de discerner ce qu'est le sentiment d'appartenance : sentiment, c'est-à-dire connaissance assez floue, claire-obscure, intuitive, affective, mue par la passion autant que par le jugement pratique. C'est pour chaque individu la conscience de la place qu'il occupe par rapport aux autres membres du groupe ; c'est l'expérience d'une identité (« Je suis semblable à eux ») et d'une différence (« Au sein de mon groupe, je n'ai pas le même statut et le même rôle que les autres »). Chacun se classe et est classé à partir de deux lieux opposés mais voisins, complé­mentaires, reliés par un réseau de relations, à l'image d'une ville, compo­sée nécessairement d'un centre et d'une périphérie. Le centre de référen­ce et d'élaboration des modèles et des décisions est le lieu des élites : ceux qui dans le groupe ont pouvoir d'influence. La périphérie est le lieu des gens plus ou moins intégrés au noyau central et généralement peu influents.

La notion de « christianisme populaire » (1) recouvre précisément l'en­semble des comportements de la masse des chrétiens, depuis les plus inté­grés, chrétiens des messes dominicales, jusqu'aux moins intégrés, les « festifs », qui pratiquent aux fêtes de leur vie sociale et familiale. La pratique culturelle reste en effet le critère le plus commode pour mesurer les degrés d'intégration à une église. Sachons toutefois qu'il n'est ni unique, ni parfait, ni infaillible.

LA PAROISSE, MICROCOSME DE L'ÉGLISE

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Robert Pannet, né en 1918 à Courtisols (Marne). Prêtre du diocèse de Châlons-sur-Marne en 1942. Curé de trois paroisses rurales jusqu'en 1966 ; chargé de quartiers populaires à Vitry-le-François jusqu'en 1975 ; actuellement aumônier militaire à temps partiel. Publi­cations : Vitry-le-François, Colmar, S.A.E.P., 1972 ; Le catholicisme populaire, trente ans après "La France pays de mission ?", Paris, Le Centurion, 1974 ; collaborateur et directeur (avec B. Plongeron) de Le christianisme populaire, coll. « Les dossiers de l'histoire ». Paris, Le Centurion, 1976.