Une contre-apologétique – Du jugement de crédibilité rationnelle suffisante à l’« évidence objective » de la Révélation

Pour Balthasar, le don de Dieu ne requiert pour se dire aucun fondement logico-philosophique préalable. C’est pourquoi la définition balthasarienne de l’apologétique se présente en réalité comme une contre-apologétique christologique, qui repose sur le fait de l’Incarnation et sur la seule puissance testimoniale de la foi. Ainsi l’acte de foi est-il déterminé non par une précompréhension, mais par un « accompagnement », c’est-à-dire par l’expérience d’une relation unique entre l’homme et Dieu dans le Christ.

Ce ne sont pas des manuels arides, même s’ils sont pleins de vérités, indubitables, qui peuvent exprimer pour le monde la vérité de l’Évangile et le rendre plausible, c’est l’existence des saints qui ont été saisis par le Saint-Esprit du Christ. Le Christ n’a pas prévu d’autre apologétique (Jean 13,35) ¹.  Herrlichkeit I., Schau der Gestalt, p. 476.

Hans Urs von Balthasar nous a gratifiés d’une définition de l’apologétique et de la théologie fondamentale aussi originale qu’inattendue. Elle fut d’emblée soumise à la critique, accusée de sacrifier par trop à un positivisme doctrinal apparenté à une source barthienne jugée peu recevable. Or, cette définition pour le moins surprenante, constitue assurément le modèle d’une contreapologétique, dans la mesure où elle se distancie expressément et intentionnellement du modèle tacite de l’apologétique comme discipline crypto ou quasi philosophique. Elle se distancie aussi du modèle libéral de théologie qui n’en est pas nécessairement le contrepoint ou l’adversaire supposé, mais une forme particulière de réalisation. Pour le théologien Hans Urs von Balthasar, en effet, la victime principale de l’apologétique – telle qu’il la définit et la reçoit sous sa forme canonique (faut-il dire populaire et vulgarisée) – est la christologie. La thèse balthasarienne est somme toute simple : le don de Dieu n’appelle et ne réclame pour se dire aucune reconnaissance préalable et instauratrice, qu’elle prenne l’homme ou le cosmos pour mesure. [...]

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1. HANS URS VON BALTHASAR, Herrlichkeit. Eine theologische Ästhetik, Band I. Schau der Gestalt, Johannes Verlag, Einsiedeln, 1961, p. 476. Pour la traduction française : La Gloire et la croix. Les aspects esthétiques de la Révélation, I. Apparition, Aubier, Paris, 1965, p. 418.

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