Les oeuvres de miséricorde

Roch A. KERESZTY
La miséricorde - n°243 Janvier - Février 2016 - Page n° 75

Pour être chrétienne, la miséricorde ne peut se contenter d’ « oeuvres » concrètes. Elle requiert d’abord de reconnaître le Christ en celui qui souffre, et ensuite de se savoir soi-même un pécheur qui doit accueillir la miséricorde divine pour la transmettre. Cette ouverture spirituelle ne remplace pas le service effectif des plus démunis, et en fait au contraire un impérieux devoir.

 

Depuis les origines chrétiennes, les sept oeuvres concrètes de miséricorde sont honorées comme les actes de charité les plus décisifs : nourrir les affamés, donner à boire à ceux qui ont soif, vêtir ceux qui sont nus, offrir un toit aux sans-abri, soigner les malades, visiter les prisonniers et donner une sépulture aux morts1.

Après un court survol historique, nous essaierons de comprendre ce que signifie la miséricorde, son lien avec l’amour, son fondement christologique et les raisons pour lesquelles ses manifestations tangibles ont davantage imprégné la conscience chrétienne que la conversion spirituelle qu’elle requiert. 

1. Dans l’histoire

Homère et le théâtre grec célèbrent la miséricorde et la compassion. La pitié d’Achille pour le vieux Priam fait, aux yeux de Simone Weil, de L’Iliade un poème divinement inspiré2. Platon, Aristote et les stoïciens ont cependant estimé que c’était là non des vertus, mais des faiblesses, pardonnables seulement chez les vieillards et les enfants. Ces philosophes encouragent la pitié envers tout être humain, mais ils méprisent les sentiments de compassion, parce que plus l’émotion est forte, plus l’âme est troublée et moins l’intelligence et la volonté gouvernent le comportement3.

Dans l’Ancien Testament, la bienveillante patience de Dieu contrebalance sa colère et les châtiments infligés à son peuple. Le Très Saint est le défenseur du pauvre et de l’opprimé, de la veuve et de l’orphelin. Leur faire du tort revient à offenser Dieu et encourir son courroux. Le Dieu d’Israël ne craint pas d’exprimer ses émotions, qu’il se lamente des infidélités ou qu’il déploie une sollicitude maternelle pour les affligés. Puisque les Israélites ont été des étrangers en Égypte, ils doivent traiter comme des compatriotes les étrangers parmi eux. Leurs reniements de l’Alliance, et en particulier le culte des idoles et l’oppression des pauvres, [...]
 

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1 Matthieu 25, 31-43 et Tobie 1, 16-20.

2 Simone Weil, « L’Iliade ou le poème de la force », publié dans Les Cahiers du Sud [Marseille] de décembre 1940 à janvier 1941 sous le nom d’Émile Novis. 

3 Voir Théodore Köhler, « Miséricorde » dans Dictionnnaire de spiritualité ascétique et mystique, Paris, Beauchesne, 1980, col. 1314.


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