Les fins dernières dans la prédication médiévale

Madame Nicole BERIOU
Imaginer les fins dernières - n°260 Novembre - Décembre 2018 - Page n° 67

Rendues familières aux hommes du Moyen Âge par les représentations figurées, les fins dernières sont très présentes dans le discours des prédicateurs. Le Jugement dernier y a une place de choix, en contrepoint de la pastorale de la pénitence qui invite à se persuader qu’entre deux hontes il faut choisir la moindre. La croyance au purgatoire implique aussi de mettre l’accent sur le jugement particulier, tandis que l’enseignement sur les fins dernières se coule parfois dans des formes théâtrales qui les dramatisent davantage.

 

Les prédicateurs médiévaux qui se proposaient de prêcher sur les fins dernières (en latin, novissima) ne pouvaient ignorer la longue description qu’en donne saint Matthieu dans le chapitre 25 de son évangile. Ils faisaient aussi abondamment référence au verset du Livre de l’Ecclésiastique (ou de Sirach) 7, 40 qui déclare : « Souviens-toi, dans toutes tes actions, des fins dernières et tu ne pécheras plus jamais ». Dans le commentaire intégral de la Bible à l’usage des prédicateurs, élaboré vers le milieu du XIIIe siècle au couvent Saint-Jacques de Paris sous l’impulsion et le contrôle du frère Prêcheur Hugues de Saint- Cher, ce verset donne lieu à une glose éloquente1. Chacune des quatre fins dernières y est qualifiée : la mort est incertaine, le jugement juste, la géhenne interminable et la gloire éternelle. Puis le commentateur fait référence au sermon 12 de diversis de saint Bernard2, qui commentait le même verset :

Peut-on penser à quelque chose de plus horrible que la mort, de plus terrible que le jugement, de plus intolérable que la géhenne ? Que craindra celui qui regarde tout cela avec assurance ? C’est pourquoi, pour résister au péché la crainte vaut mieux que la honte ou la douleur. 

Il y avait là de quoi alimenter les prises de parole d’orateurs en mal d’inspiration… Quant aux fidèles auxquels ils s’adressaient, on aurait tort, sous prétexte que ceux-ci, dans leur grande majorité, ne savaient ni lire ni écrire, de les taxer pour autant d’ignorance. Les images en effet nourrissaient les intelligences et les mémoires. Celles du Jugement dernier, conformes à la révélation qu’en donnait l’Évangile de Matthieu, avaient été peintes dans les églises au moins depuis l’époque carolingienne et, à partir du XIIe siècle, elles ont pris place sur les tympans sculptés au-dessus des portails.

La prédication, dont l’essor se situe à partir du XIIe siècle, ajoutait à la force de persuasion immédiate de telles images le pouvoir des mots. Mais encore fallait-il savoir formuler le message de salut dans un langage [...]

 

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1 Hugo de Sancto Charo, Postillae super totam Bibliam, Venise, N. Pezzana, 1703, vol. 3, p. 186, col. A.

2 Texte latin dans Sancti Bernardi Opera, dir. J. Leclercq et A. Rochais, Rome, 1970, vol. VI/1, p. 127-130, aux p. 129-130.


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