M. Gregory SOLARI
Vieillir
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n°264
Juillet - Aout
2019 - Page n° 81
Comment communiquer avec une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer ? La théorie de l’identité narrative permet d’envisager une relation et même une communion autrement qu’avec des mots, dans les espaces du silence où les présences se découvrent mutuellement.
« Comment dire » la personne atteinte d’Alzheimer ? Ou bien plutôt : « comment la personne atteinte d’Alzheimer se dit-elle ? » Derrière ces questions se trouve un même souci dans le monde du soin : comment rejoindre la personne qui fait inexorablement récession sur elle-même et se retrouve progressivement enfermée dans le silence ? Pour celui qui, comme moi ici, a recours à la théorie de l’identité narrative de la personne pour valider sa capacité à valoriser, c’est-à-dire exprimer des choix, prendre des décisions, ce souci s’apparente davantage à une inquiétude, voire une angoisse : ce silence qui attend le malade d’Alzheimer ne rend-il pas caduque une théorie de la personnalisation basée sur la parole (narration, récit, etc.) ? La question présuppose une identification : celle de la parole avec le dire – le logos. C’est cette présupposition que je voudrais interroger dans ces pages.
Rappelons rapidement les éléments essentiels de la théorie de l’identité narrative. La personnalité se donne une figure à travers une histoire ; cette histoire est formée par un tissu narratif ; ce tissu narratif ouvre des possibilités d’existence à travers les impressions qu’il suscite ; de ces impressions naissent des images, lesquelles, à leur tour, motivent une action qui va constituer la personnalité. C’est le moment dit de la « configuration » dans la théorie de Ricoeur. La personnalité a donc partie liée avec le langage (narrativité) et avec l’imagination (moyen de mettre « en oeuvre » en se l’appropriant ce qui est raconté). Pourtant, dans le fait de la rencontre de l’autre, c’est-à-dire d’être auprès de lui, attentif à sa présence en personne, en dépit du rôle joué par le langage dans la constitution de sa personnalité – et donc du sens, du logos –, la personnalité excède d’une certaine manière ce qui peut être dit d’elle. Elle demeure « in-signifiable ». Mais imaginable. Dans la composition langage/imagination qui constitue les éléments premiers de l’identité narrative, l’imagination excède ce que le langage peut dire. Mais les images dépendent des impressions ressenties : d’un moment « pathique », sans lequel ni l’imagination, ni donc la personnalisation ne seraient possibles.
C’est ce qu’illustrent les exemples avancés par ceux qui défendent la capacité de valorisation du malade d’Alzheimer : le choix d’une valeur procède non pas d’un discours (logos) mais de l’effet (pathos) produit [...]
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