Enraciné dans la foi

Gérard SOULAGES
La fidélité - n°4 Mars - Avril 1976 - Page n° 80

Fidélité d'un croyant à travers méditations, recherches, souffrances, jusqu'à la lumière et l'apaisement.

 La première page, 80, est jointe.

Je suis chrétien, et chrétien de toute mon âme, — sans hésitation, catholique. Comment suis-je devenu chrétien ? En regardant les choses de très haut, il me semble que tout se ramène à ceci : enfant, j'ai découvert la foi chrétienne, dès le catéchisme, par simple écoute de ce qu'enseignait le prêtre, M. l'abbé Bonal, — et pourtant ma famille n'était guère croyante. Devenu adulte, j'ai gardé cette foi, — ou plus exactement c'est la foi qui m'a gardé.

 

Cet enseignement était centré sur l'essentiel : Dieu, le Christ et son Evangile, l'Eglise — et, au cœur de l'Eglise, la foi qui ouvre la voie de la charité. C'était donc très simple :

« Pourquoi crois-tu ? — Parce que Dieu a parlé...

Que crois-tu ? — Ce qu'enseigne l'Église.. »

 

Il paraît que j'étais au catéchisme un élève attentif et très exigeant. J'ai maintenant 63 ans. Je garde de ce passé lointain deux faits précis. Je pratiquais avec une rigueur et un sérieux enfantins ; et l'Eucharistie, le sacrement de pénitence, l'Evangile étaient pour moi une aide exceptionnelle. Je me posais des questions continuelles moins sur l'existence de Dieu que sur l'immortalité de l'âme, — et je lisais tous les livres qui étaient susceptibles d'éclairer ces problèmes. Et je n'avais que 9 ans, l'âge de la métaphysique...

 

Dieu était en moi le fait le plus assuré. La contingence du monde, la précarité de mon existence, l'intuition intellectuelle d'une réalité absolue ayant autorité sur moi, tout cela se complétait et me confirmait. Les lumières extraordinaires apportées par la foi transformaient en certitude absolue mon raisonnement d'enfant. En quels termes devais-je alors le formuler ? en termes de cause et effet ? d'infiniment absolu, existant en lui-même et par lui-même ? Certainement pas, — et pourtant ce devait être une « expérience » profonde, déjà élaborée, car plus tard la critique(p.80) kantienne de la connaissance n'a eu sur ce point précis aucune prise sur moi : Dieu est certainement cette réalité fondatrice qui s'impose à l'homme, même si celui-ci, dès qu'il veut se la représenter, la déforme, la transforme en idole ou en théorie, ce qui rend possible la critique athée. Paradoxalement, j'unis dans une même vision métaphysique le « Dieu plus intime à moi-même que moi-même » de la tradition augustinienne, et le « Dieu supérieur à moi-même, cause suprême, transcendant à tout ce qui est » de saint Thomas d'Aquin, reprochant même à ce dernier une méconnaissance de saint Anselme. Les preuves de l'existence dé Dieu convergent. C'est l'intuition de l'absolue transcendance de Dieu qui me découvre la vraie signification de la précarité de mon être et de la contingence de l'univers. Je fais toujours mienne la très belle lettre que Descartes adressait à la reine Christine par la voie de Chanut : « Le chemin que je juge qu'on doit suivre pour parvenir à l'amour de Dieu est qu'il faut considérer qu'il est un esprit ou une chose qui pense... Si avec cela nous prenons garde à l'infinité de sa puissance... à l'étendue de sa Providence... à l'infaillibilité de ses décrets... et enfin, d'un côté à notre petitesse, de l'autre, à la grandeur des choses créées..., la méditation de toutes ces choses remplit un homme qui les entend bien d'une joie si extrême... que, se joignant entièrement à lui de volonté, il l'aime si parfaitement qu'il ne désire plus rien au monde, sinon que la volonté de Dieu soit faite. »

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