Je t'ai appelé par ton nom » (bonnes feuilles)

Pierre VAN BREEMEN
L'Esprit Saint - n°63 Janvier - Février 1986 - Page n° 119

Pierre van BREEMEN

Nous avons voulu offrir à nos lecteurs quelques bonnes feuilles du livre du P. Pierre van Breemen, Je t'ai appelé par ton nom, qui vient de paraître chez Fayard dans la collection « Communio ». Tout le texte est joint.

A première vue, la situation paraît comique. Nous avons Zachée, personnage important dans cette petite ville frontière de Jéricho, officiel de haut rang du service des contributions, homme riche, et nous le trouvons, tout entier à sa curiosité, perché sur un sycomore, regardant la foule qui se presse à ses pieds autour d'un jeune rabbi. Cette scène ne semble pas très spirituelle ! Et pourtant, dans la rencontre de Jésus avec Zachée, nous retrouvons tous les éléments de la mission du Christ, le Fils de l'homme, celui qui vient chercher et sauver ce qui est perdu.

(•...)

Eh oui, il y avait dans la vie de Zachée quelque chose qui n'allait pas, quelque chose qui le troublait. Ce n'était pas encore clair dans son esprit ; il ne discernait pas très bien le problème, mais il devait faire quelque chose. Cela ne pouvait plus durer ainsi. Pour commencer, il voulait simplement regarder, voir à qui il avait affaire. Ensuite, s'il jugeait pouvoir aborder Jésus, il essaierait d'avoir avec lui une conversation. Et enfin, si tout allait bien, il aurait peut-être le courage de discuter avec cet homme de son malaise intime. Car Zachée était bel et bien préoccupé. Le mépris unanime de toute la ville pour les collecteurs d'impôts, la façon dont lui et ses collègues étaient regardés de haut par leurs compatriotes, cela suffisait bien. Mais somme toute, ce n'était encore qu'extérieur ; une difficulté à fleur de peau qui, à la longue, pouvait néanmoins devenir un tourment. Le vrai problème pourtant, était intérieur : Zachée n'était pas en paix avec sa conscience. Tout au fond, il savait ce qu'il était réellement : un exacteur, un homme si avide de profits qu'il n'hésitait pas, à la limite, à devenir cruel. Zachée savait qu'il ne devait pas agir ainsi ; il avait souvent décidé de changer de vie. Mais ses bonnes résolutions ne duraient jamais longtemps. Il tenait bon pendant quelques jours, puis, quelque chose le faisant trébucher, il retombait dans ses anciennes habitudes.

 

(• …•)

Zachée veut d'abord, tout simplement voir qui est Jésus. Mais le publicain est de trop petite taille ; il ne peut apercevoir Jésus à cause de la foule. Et nous retrouvons ici une analogie avec notre situation. Il est possible, en effet, que la foule nous empêche de voir Jésus. Nous devons grimper plus haut pour le voir ; mais attention, s'élever plus haut que la foule est très dangereux : cette dernière n'aime pas beaucoup ce genre de performance. Le dédain de nos semblables, plus qu'autre chose, peut arrêter notre recherche de Dieu. Nous redoutons ce que les autres pourraient dire de nous. Cette peur du ridicule nous paralyse plus réellement que ne le ferait une attaque ouverte ou une violente critique. Que de bien reste non réalisé parce que nous craignons l'opinion des autres ! Nous restons figés à la pensée : « Que vont-ils dire » ?

(•…)

La tyrannie de nos semblables ! Voilà sur quoi nous devons grimper si nous souhaitons voir qui est réellement Jésus. Zachée eut le courage de se hisser plus haut que la foule ; et soyons certains que les gens se moquèrent de lui : un inspecteur principal des contributions dans cette position ridicule ! Mais à ce moment-là, Zachée n'y prête nullement attention, parce que la seule chose qui le préoccupe est d'apercevoir Jésus. Une fois dans l'arbre cependant, l'inattendu commence. Jésus, le rabbi qu'il ne connaît pas, se comporte comme si Zachée était une de ses vieilles connaissances, comme s'ils étaient bons amis. Et, en effet, Zachée est bien son ami, parce que c'est précisément pour des gens comme lui qu'il est venu :

Je suis venu appeler non pas les justes, mais les pécheurs. (Matthieu 9, 13)

Et comme Zachée est un pécheur, il est un de ceux que le Christ cherche. Nous voyons, dans les Evangiles, une relation surprenante entre Jésus et les pécheurs. Son nom, expression de sa mission, est «Jésus, car c'est lui qui sauvera son peuple de ses péchés» (Matthieu 1, 21). Et ici, dans l'arbre, il y a un homme à sauver. Il est révélateur de voir comment Jésus agit envers les personnes qu'il assiste. Il guérit les malades QU'ON LUI AMÈNE ; mais pour les pécheurs, il prend lui-même l'initiative et va vers eux, comme il le fait dans le cas de Zachée. Il s'adresse à l'homme inquiet : Zachée, descends vite : aujourd'hui, il faut que j'aille demeurer chez toi.(Luc 19, 5)

Descends. C'est la première chose à faire. Nous devons avoir les deux pieds sur terre ; autrement Jésus ne peut rien pour nous.

(•…)

Une fois à la maison, (...) Jésus ne fait pas la morale à Zachée, il lui témoigne tout simplement une confiance et un amour sans limites ; en Jésus,

Dieu a manifesté sa bonté et sa tendresse pour les hommes... (Tite 3, 4)

C'est là ce que Zachée n'avait plus connu depuis des années : amitié, amour ; non plus condamnation ou contrainte, mais amour tout simplement. C'est une expérience si extraordinaire pour Zachée, qu'il doit se passer quelque chose. Et brusquement, la transformation s'opère. Tant qu'il s'était trouvé sous contrainte, rien ne pouvait changer ; mais dès que cette pression disparaît et qu'il se sent accepté, le changement est possible. Une fois arrivé à la maison, Zachée doit parler, et il éclate :

 

Voilà, Seigneur : je fais don aux pauvres de la moitié de mes biens, et si j'ai fait du tort à quelqu'un je vais lui rendre quatre fois plus. (Luc 19, 8)

 

(•…)

Dès que nous laissons le Seigneur pénétrer chez nous, derrière la façade et jusque dans notre coeur, nous pouvons être certains que quelque chose va changer. En un instant, Zachée a rompu avec l'argent, sa situation et tout ce à quoi il était attaché. Oui, il était prisonnier du système romain, mais ce n'était possible que parce qu'il était attaché à son argent. Dès que cet amarre est brisée, il n'est plus enchaîné, il devient un homme libre.

 

(•…)

Reste une dernière réflexion sur Zachée dans son arbre. Zachée était petit ; il a dû grimper sur un sycomore. Aurait-il grimpé s'il n'avait pas été si petit ? Et s'il n'avait pas grimpé, tout cela serait-il arrivé ?

(p. 81-90)


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