Gérard CHOLVY
Quelle crise?
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n°50
Novembre - Décembre
1983 - Page n° 68
Comment, face aux défis de la société industrielle, de ses réussites et de ses échecs, Ozanam inventa une science nouvelle et une charité nouvelle.
La 1ère page, 68, est jointe.
CET affreux XIXe siècle mérite-il encore une quelconque attention ? Prenant à rebours l'histoire hagiographique, tout un courant révisionniste n'est-il pas parvenu à démontrer que les élites chrétiennes avaient failli ; que croire au Ciel avait ôté aux meilleurs le sens averti des problèmes de leur temps, et du principal d'entre eux, la montée du paupérisme né de la Révolution industrielle ? Le débat est d'importance en ce qu'il concerne une part de nos racines. Il se trouve que la brève mais dense existence de Frédéric Ozanam est de celles qui invitent à assumer un héritage en tâchant d'entrer dans la sensibilité d'une époque. C'est le 23 avril 1833 — il y a 150 ans — qu'un petit groupe d'étudiants s'est réuni pour fonder la Société de Saint Vincent de Paul ; celui qui en est l'un des principaux fondateurs, une fois les préparations achevées, fut l'un des artisans les plus en vue du renouveau catholique sous la Monarchie de Juillet et l'un des esprits les plus lucides devant la montée du paupérisme ouvrier.
1. Un jeune Lyonnais « merveilleusement doué »
Une tradition familiale rapportait une ascendance israélite chez les Ozanam. Frédéric y a cru : « C'est un grand honneur d'être né israélite, de se sentir fils de ces patriarches et de ces prophètes » écrit-il le 6 mai 1853 à un juif converti. Lui-même est né à Milan le 23 avril 1813. Son père, ancien soldat de la campagne d'Italie, avait épousé en 1800 la fille d'un soyeux lyonnais. Homme de ressources, il sut affronter maintes difficultés. De 1809 à 1816, il habite Milan comme enseignant puis médecin des hôpitaux, après la conquête des diplômes nécessaires à l'Université de Pise. La réorganisation de l'Europe A la fin des guerres napoléoniennes s'accompagne du retour de la famille à Lyon.
Le docteur Ozanam « avait gardé la foi... un grand sentiment de justice, une infatigable charité pour les pauvres. Il aimait les sciences, les arts et le travail » (1853). De la famille de sa mère viennent les échos de l'insurrection lyonnaise réprimée par la Convention de 1793, parents arrêtés, un frère de 19 ans mitraillé aux Brotteaux en décembre. Marie Nantas fut à la fois soucieuse de l'éducation des enfants qui survécurent (p.68)(4 seulement sur 14) et chrétienne active regroupant chaque quinzaine pour des instructions une trentaine d'ouvrières de la Société des veilleuses : « Mon Dieu, le premier de vos bienfaits, c'est de m'avoir donné de tels parents » (1853).
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