John Henry Newman – La croyance au naturel

M. Gregory SOLARI
La tradition - n°253 Septembre - Octobre 2017 - Page n° 113

C’est dans la Grammaire de l’assentiment (1870), que Newman expose le mieux la conviction qui l’habite dès le premier moment de sa réflexion sur le rapport entre la foi et la raison, centrale dans sa vie aussi bien que dans sa pensée: croire est naturel. Rappelant la phrase de saint Ambroise que Newman plaça en exergue - «  Ce n’est pas par la dialectique qu’il a plu à Dieu de sauver son peuple »- l’auteur tente d’expliquer ce que Newman entend par « assentiment ».

 

La question du rapport de la foi et de la raison est centrale dans la vie aussi bien que dans la pensée de Newman.  On ne peut d’ailleurs pas distinguer chez lui les deux éléments – « existentiel » et épistémologique – de cette question. Sa vie même constitue l’élucidation de ce rapport. Plusieurs moments cristallisent les acquis auxquels Newman parvient au cours de sa recherche : sa première conversion (1816), le début du Mouvement d’Oxford (1833), son entrée dans l’Église (1845), sa réponse à Charles Kingsley (1865), le concile Vatican I (1870). À chacun de ces moments correspond une oeuvre : à la première conversion de Newman le récit autobiographique de « l’histoire de ses opinions religieuses » (Apologia pro vita sua), au Mouvement d’Oxford les Sermons universitaires, à la conversion de 1845 l’Essai sur le développement de la doctrine chrétienne, au concile Vatican I la Lettre au Duc de Norfolk (1873) et la Grammaire de l’assentiment (1870). Je choisis de retenir ici un ouvrage en particulier : la Grammaire de l’assentiment. Pourquoi ce choix ? Pour au moins deux raisons. 1) Alors  que tous les autres livres de Newman sont des écrits de circonstance (tous répondent à une sollicitation extérieure), la rédaction de la Grammaire s’est imposée à Newman comme un devoir dont l’origine se trouve dans la question du rapport entre foi et raison – question cruciale pour lui, puisqu’elle a décidé de la trajectoire de sa vie ; 2) C’est dans la Grammaire que l’on trouve fixé, ou stabilisé, le lexique philosophique dont les premières formulations apparaissent dans les Sermons universitaires (anglicans) commencés en 1826. Cela fait-il de la Grammaire le « dernier mot » de Newman sur la question du rapport de la foi et de la raison ? Faut-il lire Newman à la lumière de la Grammaire ? Ce serait réduire la richesse des perspectives de ses autres ouvrages (notamment des Sermons universitaires), dans lesquels Newman ouvre des pistes qu’il n’explore pas (ou pas directement) dans la Grammaire. Il reste que c’est néanmoins dans ce livre de 1870 que l’on trouve formulée d’une manière que Descartes aurait qualifiée de « claire et distincte » la conviction qui habite Newman dès le premier moment de sa réflexion sur le rapport de la foi et de la raison : croire est naturel. Cette conviction est affimée dès la page de titre du livre : Newman y fait figurer en exergue cette phrase de saint Ambroise : « Non in dialectica complacuit Deo salvum facere populum suum » – Ce n’est pas par la dialectique qu’il a plu à Dieu de sauver son peuple (De fide [ad Gratianum], I, 5, 42). Cette citation constitue, je crois, la clef de lecture de la Grammaire et nous installe d’emblée au coeur du propos de Newman.

Que recouvre cette dialectique impuissante à nous procurer le salut – sous-entendu : le salut « par la foi » ? À quoi Newman fait-il référence ici ? À au moins deux choses. 1) À Aristote d’abord, auquel Newman [...]

 

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