Manger de la viande

M. Vincent CARRAUD
Manger - n°259 Septembre - Octobre 2018 - Page n° 97

On s’émeut aujourd’hui de la souffrance des bêtes destinées à la boucherie. Le problème, cependant, est philosophique : quelle différence légitime le droit de l’homme à disposer de l’animal ? Pour le chrétien, la question est aussi théologique : comment l’Eucharistie, sacrifice non sanglant mais manducation du corps du Christ, transforme-t-elle le rapport à la nourriture, dont la viande ?

 

« Toute chair n’est pas la même chair » 1 Corinthiens 15, 39

Écarter les faits : la question

Après quatre décennies de débats sur ce qu’on a appelé « l’éthique animale », menés en général à partir d’une problématique utilitariste  (de la considération des intérêts des êtres sensibles, voire de leurs droits, et de la critique du spécisme à la dénonciation de la souffrance animale1), le développement du végétarisme (qui exclut la consommation de la chair animale) et du végétalisme (qui exclut aussi les produits laitiers ou les oeufs et n’entend consommer que des produits végétaux) ou du véganisme (qui exclut la consommation de tout produit dû à une exploitation animale, comme le miel) a donné lieu à de nombreux essais qui mettent en cause la légitimité de manger de la viande, en tant qu’elle implique l’élevage d’animaux dits domestiques et leur abattage. Les limites de cet article comme de la compétence de son auteur interdisent d’examiner en détail cette littérature aujourd’hui abondante. Il s’agira seulement ici de se demander si ces débats sont de nature à concerner en propre les chrétiens et, si c’est le cas, de poser les questions qu’ils leur imposent. Pour ce faire, il convient d’éviter deux ensembles d’enquêtes susceptibles de nous égarer, quelque intéressantes qu’elles soient : présentées à charge contre la consommation de viande et les conditions d’élevage et d’abattage qui la fournissent, elles sont rappelées dans l’utile synthèse historico-philosophique de Florence Burgat, L'humanité carnivore2.

  1. L’examen, de nature biologique et paléontologique, de la validité de la thèse qui déduit la consommation de la viande (plus ou moins constante, plus ou moins universelle) d’un besoin humain de protéines animales. Admettons sans discussion que cette explication soit infondée.
  2. L’hypothèse anthropologique trop générale selon laquelle la consommation de viande (y compris l'anthropophagie) est par essence liée aux sacrifices. Je m’abstiendrai donc de reprendre les arguments qui s’opposent à la thèse de René Girard3 pour montrer que les sacrifices [...]

 

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1 Voir les compléments bibliographiques à la fin de cet article.

2 Paris, Seuil, 2017 ; voir les compléments bibliographiques à la fin de cet article. 

3 Voir le livre pionnier La violence et le sacré (Paris, Grasset, 1972), dont plusieurs autres livres déclinent diversement l’intuition initiale (voir à la fin de cet article).


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