Le combat spirituel du baptisé

Le combat spirituel du baptisé

« Le combat spirituel ». L’expression n’étonne plus. L’image en est presque d’Épinal : on imagine un diable rouge à la queue pointue disputant à l’ange – ailé, immaculé – la décision qu’un homme doit prendre. Un homme ? Milou, dans Tintin au Tibet, n’y échappe pas : entre ange et démon, va-t-il apporter le message qui lui est confié, ou s’arrêter en chemin pour ronger l’os qu’il vient de croiser ?

Évidemment, le combat spirituel excède de loin les atermoiements de Milou ou les errements de l’âne de Buridan. Rimbaud le disait « aussi brutal que la bataille d’hommes ¹ ». Cette brutalité, il faudrait sans doute la lui reconquérir. Car le combat spirituel atteint un lieu plus profond encore que là où le dilemme moral se joue. Et peut-être n’est-il rien de tel, pour redécouvrir un tel lieu, que d’apposer à l’expression « combat spirituel » un syntagme qui donne à ce numéro de Communio son titre mais qui a tout pour nous étonner (nous ?... en tout cas le philosophe que je suis) : « la condition baptismale ».

Le combat spirituel du baptisé

Le présent article s’intéressera d’abord à ce que ce terme de « condition » évoque au philosophe, notamment quand on distingue grâce à lui condition et nature humaines. On appliquera ensuite le fruit de cette enquête à la condition baptismale afin, dans un troisième temps, de découvrir à quel combat est livrée cette condition baptismale et en quoi il est à la fois spirituel et brutal.

La condition humaine

En général, on parle de « condition » (humaine, ouvrière, féminine...) pour ne pas (ou pour ne plus) parler de « nature ».

La nature d’une chose désigne ce que cette chose est en tant qu’elle est sortie, toute pure, des mains d’une Nature qui ne fait rien en vain ² . La ...

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 1 RIMBAUD, Une saison en enfer (1873), « Adieu ».

 2 ARISTOTE, De Incessu animalium, 2, 704b12-18.Évidemment, le sens de « nature » dépend en partie de la distinction où la nature se trouve prise. Par exemple, en tant que distincte de la surnature, la nature n’est pas exactement ce à quoi s’oppose la culture. La distinc- tion conceptuelle influe sur le sens des concepts qu’elle distingue. Ainsi, dans les distinctions naturel/surnaturel ou nature/culture, la nature a le sens d’une résistance à la forme qui la rapprocherait presque de ce que nous nommerons ici « condition » (voir Martin HEIDEGGER,