Faire l'Europe », pour quoi faire ?
L' EUPHORIE européenne bat son plein. L'accélération du processus d'intégration de la Communauté Economique Européenne est désormais considérée comme un objectif majeur, voire prédominant, non seulement par les pouvoirs publics de la quasi-unanimité des Etats membres, mais aussi par les opinions publiques nationales. En fixant l'accord des Gouvernements et des Parlements nationaux sur la réalisation dès 1992 d'un espace « sans frontières intérieures, où serait assurée la libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux », l'Acte Unique Européen a, dès 1985, donné une impulsion incontestable à cette accélération, en fixant une date-butoir à la réalisation d'un « Marché Unique », et ce qu'on oublie souvent en élargissant les objectifs du Traité de Rome à des domaines nouveaux : coopération politique, union économique et monétaire, environnement, recherche, politique sociale. En acceptant de signer ce Traité, dûment ratifié par les Parlements nationaux, les Etats membres ont clairement accepté de se soumettre à des procédures qui limitent de plus en plus ce qu'on appelle leur « souveraineté », c'est-à-dire leur capacité de s'opposer seuls à des décisions souhaitables pour leurs partenaires ; l'extension des domaines où le vote à la majorité qualifiée suffit pour l'adoption de « directives » applicables à tous est l'exemple le plus frappant de ce nouvel état des choses. Les opinions publiques acceptent visiblement cet objectif politique, du moins dans son principe. Les entreprises sont de plus en plus exaspérées des règles nationales qui les empêchent d'importer ou d'exporter sans contraintes, et des procédures longues et coûteuses qui leur sont imposées par les Etats, alors même que leurs rapports avec leurs concurrents et parte