Apologétique et apologie

Monsieur Jean-Luc MARION
L’apologétique - n°231 Janvier - Avril 2014 - Page n° 9

Partant de l’injonction que fait saint Pierre d’être toujours prêts à l’apologie devant qui nous demande raison de notre espérance, l’article souligne d’abord négativement ce qu’il ne faut pas faire, éclairant ainsi l’ambiguïté de ce que nous nommons apologétique, pour recommander ensuite ce que les Pères apologistes du IIe siècle appelaient apologie et surtout, dans des lettres ad intra ou dans des suppliques ad extra, pratiquaient avec une grande rigueur théologale : la confession de foi en la résurrection du Christ qui fonde notre espérance.

 

Ce que nous entendons par apologétique, qui a une histoire récente et une légitimité questionnable1, ne devrait en tout cas s’autoriser que d’une – certes célèbre – formule de Pierre :

« Sanctifiez dans vos cœurs le Seigneur, le Christ, toujours prêts pour l’apologie (pros apologian) envers quiconque vous demande la raison (aitionti humas logon) de l’espérance qui est en vous, maisavec douceur et crainte » (1 Pierre 3,15). Dans une période où les chrétiens, sans être encore soumis à une persécution institutionnelle (par l’État, en l’occurrence l’empire de Rome), endurent déjà des vexations, des soupçons et des accusations dans la vie quotidienne, Pierre leur demande trois choses : sanctifier le Christ comme le seul Seigneur, fournir la raison (l’argument, le logos) de ce qu’ils espèrent, et le faire avec douceur (envers les hommes) et crainte (envers Dieu). Ces remarques, si simples d’apparence, deviennent pourtant beaucoup plus remarquables, voire surprenantes si nous les reformulons sur un mode négatif. – On dira donc qu’il faut, premièrement, ne prendre la parole explicite et publique que sur le fond de la demande permanente et intérieure « que ton Nom soit sanctifié » : ce qui veut dire qu’on ne peut, et donc qu’on ne doit parler du Christ au monde qu’à la mesure où, intimement, nous sommes dévorés par la jalousie de son Nom, obsédés par la sanctification de ce Nom « sur la terre comme au ciel » ; d’où il suit que si nous n’accomplissons pas en pensée cette sanctification, le discours d’explication et d’auto-justification ne vaut rien, puisque nous restons en fait aussi païens que ceux auxquels nous nous adressons ; sans cette pratique de la sanctification (louange, accomplissement de la volonté de Dieu), nous ne saurons ni ce que nous disons, ni de quoi nous parlons, lorsque nous argumenterons envers nos interlocuteurs, voire adversaires. Pas d’apologie sans expérience de la charité. [...]

 

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1. Voir infra, V. CARRAUD, p. 19.

 

 

 

 

 


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