Une nécessité bien plus que biologique

Monsieur Jean DUCHESNE
Manger - n°259 Septembre - Octobre 2018 - Page n° 7

Toute civilisation a sa cuisine, qui est comme un langage où se traduisent ses croyances et la place que se reconnaît l’homme dans le monde. C’est un des domaines où l’humanité porte l’empreinte de la Bible. Le christianisme libère de tous les interdits, en particulier de celui qui porte sur la viande, mais valorise l’action de grâce, l’abstinence et le jeûne comme participation par grâce à la vie éternelle qui est offrande et partage des dons reçus.

 

Nous nourrir nous occupe sans doute davantage que nous n’en avons conscience. C’est aussi bien plus révélateur que nous ne l’imaginons de ce que nous sommes et de notre vocation.

Sous nos climats, de nos jours, seuls quelques mendiants nous disent avoir faim. Les générations nées après la Seconde Guerre mondiale n’ont pas souffert de sous-alimentation. C’est au point que le problème, pour certains des moins favorisés, n’est pas le manque de calories, mais l’obésité. Au niveau planétaire, la malnutrition (au sens d’insuffisance quantitative de nourriture, et non de «mal-bouffe») toucherait encore les 30% plus pauvres. La cause en est des faillites d’États et des conflits armés qui paralysent la production et la distribution de nourriture. En cas de crise aiguë ou de catastrophes dites naturelles, les ONG humanitaires montent au créneau.

Reste préoccupant à l’arrière-plan le réchauffement climatique qui suggère un dérèglement du rapport entre l’humanité et le cadre dont elle tire les moyens de son existence.

Entre le quotidien et la fête

Nous avons donc bien dépassé la préhistoire où les tribus erraient en quête de territoires où la nourriture était abondante, en chassaient si besoin les occupants1 puis s’efforçaient de repousser de nouveaux arrivants affamés. La richesse a changé de nature, de même que la motivation des migrations. Ce sont les savoir-faire technologiques qui priment: ils assurent une prospérité dans la paix qui attire ceux qui fuient des zones dysfonctionnelles de la planète. La croissance démographique a beau se poursuivre, il y a en théorie, au moins à moyen terme, assez à manger pour tout le monde 2.

De sorte que se nourrir est devenu chez nous comme une formalité : à la fois une obligation qui peut être expédiée, voire devenir fastidieuse, tant nous sommes sollicités par ailleurs et, à l’instar de l’eau disponible à volonté au robinet, un dû procuré par toute une industrie dont le poids économique n’est plus décisif et qui ne laisse faire à chacun qu’un minimum pouvant se réduire à choisir selon ses caprices parmi ce qu’il trouve dans son assiette. [...]

 

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1 Voir Les Héritiers de William Golding (1955).

2 ‌La population mondiale a doublé (de 3 à 6 milliards d’individus)entre 1960 et 2000, et devrait atteindre les 8 milliards vers 2025.


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