De la prière comme lieu de la théologie

La pensée de Balthasar éclaire celle de saint Anselme.Elle conduit à reconnaître Dieu comme « tel qu'on n'en peut rien penser de plus grand », ce qui signifie l'abandon d'une ontologie philosophique préalable à la réflexion théologique. Mais alors que c'est la transcendance débordante de Dieu qui nous donne de le penser, la « reconnaissance de l'existence de Dieu » s'insère dans la prière : nous demandons à Dieu de nous aider à connaître ce qui surpasse toute connaissance.

 

I. L’Événement ultime

Suis-je qualifié pour évoquer la mémoire d’Hans Urs von Balthasar ? Je n’ai lu qu’une petite partie de son oeuvre immense ; je n’ai même pas cherché ses principes de cohérence ; je me suis laissé entraîner par le regard que ce théologien porte à la personne de Jésus, figure insurpassable de la Révélation ; je me suis laissé féconder par certaines pages au souffle intense ; je me suis laissé mener vers des styles de théologie antérieurs à la rupture introduite en Occident par la redécouverte d’Aristote ; j’ai fait une sorte de « retour en arrière » vers les Pères de l’Église, dans l’espoir de surmonter les apories qui me semblaient venir des catégories de la scolastique du XIIIe siècle. Mais peut-être n’honore-t-on ses maîtres dans la foi qu’en traçant, comme eux, son propre chemin vers ce « Dieu plus grand que notre coeur » (1 Jean 3, 20) ? Aussi, pour dire publiquement ma reconnaissance à Balthasar, dirai-je seulement comment j’entends aujourd’hui le passage de La Foi du Christ qui m’a jadis servi de phare pour approcher les écrits de saint Anselme du Bec :

Il faut que, dans l’événement présenté dans l’annonce, Dieu luimême resplendisse dans son absolu divin, pour que l’événement reçoive l’adhésion inconditionnée de la foi. Comment est-ce possible ? Comment le caractère de cet événement porte-t-il le caractère divin ? Cela tient essentiellement à ce que l’événement de la croix et de la résurrection du Christ apparaît marqué d’un trait paradoxal :  quelque chose qui demeure en soi-même et à jamais  incompréhensible, et qui cependant, dans cette incompréhensibilité même, se manifeste comme dépassant (a priori) toutes les représentations possibles de Dieu. On peut situer l’évidence unique qui brille à travers cet événement entre les deux formules de saint Anselme de Cantorbéry, sur Dieu qui est id quo majus cogitari nequit (Proslogion, II), et sur l’homme qui rationabiliter comprehendit incomprehensibile esse (Monologion LXIV). Si les deux formules valent de la connaissance de Dieu, comme le pense Anselme, elles ne peuvent valoir moins, elles valent au contraire pleinement là où Dieu lui-même se révèle à l’humanité de façon définitive. [...]

 

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