Fuocoammare — par-delà Lampedusa (Gianfranco Rosi, 2016)

Père Denis DUPONT-FAUVILLE
Le temps d’en finir - n°249 Janvier - Février 2017 - Page n° 119

Ours d’or du dernier festival de Berlin, Fuocoammare est sorti à Paris de façon presque confidentielle. C’est pourtant l’honneur du cinéma que de pouvoir entraîner ses spectateurs dans de telles méditations qui, sans prétendre imposer une solution, convoquent notre discernement.

 

Samuele, un gamin de 13 ans, vit à Lampedusa, minuscule îlot au sud de la Sicile. Il a les préoccupations d’un garçon de son âge : voir ses amis, chasser les oiseaux, devenir autonome, grandir. Avec un langage fruste, entouré de gens
rudes, il erre sur son caillou d’île, arpentant le port, observant l’horizon, fabriquant des frondes, s’essayant à l ’anglais.

La caméra bienveillante de Gianfranco Rosi, discrète, le suit en prenant le temps nécessaire. Tout se passe lentement, nul instant n’est perdu. Un enfant d’homme grandit, apprenant à maîtriser un espace où chaque arpent est mesuré, cerné par la mer immense. 

Progressivement, nous découvrons cette mer, sans cesse mise à distance et pourtant omniprésente. Les hommes en parlent, certains ont vécu dessus, c’était leur lot, mais cette vie n’était pas humaine. La mer reflète le ciel, la mer recouvre des abîmes, la mer fournit la nourriture ; elle est crainte, racontée, explorée, écoutée, redoutée. Elle fait partie de la vie mais peut apporter la mort. La mer donne le mal de mer, que seul un bon repas aux fruits de mer permettra d’oublier.

Et puis, sur cette mer, d’autres forces apparaissent : des antennes la scrutent, des hélicoptères la survolent, des vaisseaux de guerre la parcourent. De temps en temps, au hasard des ondes radios, des appels de détresse s’élèvent dans la nuit, que la houle ne parvient pas à recouvrir ; des canots affleurent sur l’horizon, des corps émergent, certains vivants d’autres morts ; les cris qui transperçaient la nuit deviennent des visages. Des visages muets, aux joues creusées de larmes, aux fronts chagrins et fiers.

Entre le regard du petit paysan sicilien et ceux des migrants africains, quels échanges possibles ? Tous sont rivés vers la mer, chacun a son histoire, aucun n’est très bavard. Les deux univers sont ainsi montrés, montés en parallèle. Jamais les yeux de Samuele ne croiseront ceux de ces femmes martyrisées ou de ces adolescents brûlés par le mélange d’eau de mer et de [...]

 

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