Goulven MADEC
Croire en la Trinité
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n°145
Septembre - Décembre
1999 - Page n° 79
On sait que saint Augustin était un bon chrétien, mais certains théologiens ont douté qu'il fût un bon théologien de la sainte Trinité. Or, si la vie et l'œuvre d'Augustin ne sauraient être séparées, on ne saurait davantage dissocier sa doctrine trinitaire en tentant d'y repérer des schèmes philosophiques non convertis par la foi. Quoique composé sur une très longue période et publié très tard, le De Trinitate est un livre d'une profonde unité. Cette unité est celle d'une recherche dans la foi, d'un progrès de livre en livre. L'analyse de sa structure en fait apparaître la méthode originale, sans prétention dogmaticienne, mais où l'on peut voir un exemple achevé d'exercitatio animi.
L’article que le Père Goulven Madec nous donne ici sur « la méditation trinitaire d’Augustin » entreprend de répondre à une question à coup sûr déconcertante pour la plupart des catholiques, habitués à vénérer en saint Augustin l’un des plus grands parmi les Docteurs de la foi. Tout au plus avons-nous entendu dire que la tradition de l’Église avait parfois pris ses distances avec quelques durcissements de la théologie augustinienne de la grâce... Mais qui douterait que, dans sa foi trinitaire, Augustin ait été au-dessus de tout soupçon ? Et si l’on était conduit à en douter, ne faudrait-il pas récuser en bloc l’ensemble de la théologie trinitaire occidentale qui doit tant au Docteur d’Hippone ? Ce soupçon a pourtant été formulé. Non seulement par une partie de la pensée orientale, peu portée à adhérer à la théologie augustinienne du Saint-Esprit, et au filioque en particulier, mais aussi tout récemment, sur la base scientifique de la critique des sources. Au principe, nous trouvons un constat : l’influence exercée sur Augustin par le courant philosophique néoplatonicien (influence dont il convient lui-même), et par la pensée de Plotin en particulier. À partir de ce constat, la question se pose de savoir ce qu’Augustin tire de ces philosophes : s’agit-il simplement d’instruments de pensée qu’il met au service de la théologie trinitaire, ou bien les emprunts conceptuels déterminent-ils en son fond cette théologie elle-même ? C’est dans ce dernier sens qu’Olivier du Roy interprétait saint Augustin dans sa thèse sur L’intelligence de la foi en la Trinité selon saint Augustin (1966). Laissant de côté les oeuvres de la maturité, et en particulier le maître ouvrage De Trinitate, ce chercheur parvenait à la conclusion que la triadologie augustinienne n’avait, tout bien pesé, rien d’original, et que « l’intelligence d’Augustin [n’était] qu’à moitié évangélisée par sa foi ».
On verra dans les pages qui suivent comment l’examen du De Trinitate dirime définitivement le débat, à la fois parce que cet ouvrage est pour une large part un commentaire de l’Écriture, et parce que, en tant qu’« exercice de l’âme » (exercitatio animi), il se donne pour tâche non de « démontrer » la Trinité, ni même de rechercher dans le créé des analogies trinitaires, mais de conduire l’esprit humain à refaire l’expérience spirituelle d’être créé à l’image de Dieu – et du Dieu Trinité. [...]
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