Le chemin des Francs

Jean-marc DAUL
Le pèlerinage - n°132 Juillet - Aout 1997 - Page n° 61

Vivre en pèlerin, ne serait-ce que quelques jours, constitue une expérience de vie chrétienne inoubliable. Le chemin de Compostelle est à la fois une aventure personnelle et une découverte de la communion ecclésiale. En marchant avec le Christ, chacun découvre son prochain dans un véritable dévoilement du coeur.

1993 était une année sainte à Saint-Jacques-de-Compostelle et le désir d'y aller en pèlerins nous avait réunis : notre groupe de cinq amis, dont un prêtre, partit du côté français des Pyrénées, de Saint-Jean-Pied-de-Port, le 25 juillet – jour de la fête de l'apôtre. Le trajet demanderait un mois à ceux qui avaient su prendre cette disponibilité; quinze jours et un billet de train aux autres.

Le propos des lignes qui vont suivre n'est pas d'abord narratif : elles sont avant tout la reconnaissance de ce qui a été vécu, devant Dieu et entre frères, et l'expression du désir de le proposer à un plus grand nombre (Marc 4, 19). Très vite, le chemin de Saint-Jacques se révèle aride : il s'agit pour chacun de s'accoutumer au rythme nouveau de journées envahies par la marche, de trouver sa propre allure, de se convaincre que le contenu de son sac est bien nécessaire... Et même un groupe de cinq personnes parvient à s'étirer appréciablement au fil de sa progression ; dès lors, si les occasions de cheminer à deux ne manquent pas, elles alternent pour chacun avec des phases de progression solitaire : découverte silencieuse des paysages traversés, à un rythme devenu inhabituel, résurgence de souvenirs, réflexions adressées à soi-même, et dialogue avec Dieu – avec le Christ toujours présent (Matthieu 28, 20).

De quoi Lui parle-t-on sur une route de Navarre, campagnarde, presque toujours en pente montante, sans ombre ? Plus justement, il ne s'agit plus de dialogue, mais de l'expérience muette d'une étonnante présence, d'un réconfort qui prend véritablement une épaisseur physique, somatique. Faut-il risquer l'analogie avec les sentiments d'un malade alité qu'on visite, auprès de qui on s'attarde sans trop savoir choisir ses mots ? Et si oui, quel saisissant retournement : ce serait une même frange de Son manteau qu'Il ferait saisir et à celui qui ne quitte pas sa chambre et à celui qui multiplie chaque jour les heures de marche. Les soirées dans les gîtes généreusement aménagés pour les pèlerins semblent alors trop courtes pour relire l'histoire d'Israël au désert, où l'on entend « Je vous ai fait marcher durant quarante ans dans le désert; vos vêtements ne se sont pas usés sur vous et ta sandale ne s'est pas usée à ton pied » (Deutéronome 29, 4). [...]

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