Après le numéro sur la paroisse: Lettre à Communio

Jacques PERRIER
Dieu le Père - n°140 1998 - Page n° 189

Réactions de Jacques Perrier au numéro sur la Paroisse.

Tout le texte est joint

 

VOUS m’avez demandé d’écrire mes réactions sur ce numéro.

J’aurais dû le relire. Je n’ai pas pu, l’ayant jeté, le trouvant indigne de votre collection. La livraison comporte, évidemment, des monographies documentées. Mais le ton de l’ensemble est donné par l’éditorial et un long dialogue fictif. Sans doute celui-ci se veut-il humoristique, mais ce n’est pas mépriser Communio que de la ranger dans la littérature sérieuse plutôt qu’humoristique.

Reste donc l’impression générale que le clergé, les appareils diocésains et les évêques s’ingénient à faire disparaître les paroisses qui forment pourtant le premier tissu social de la vie chrétienne.

Comme les mauvais théologiens s’attaquent à la foi proclamée, les mauvais pasteurs s’attaquent à la foi célébrée et vécue : les uns et les autres sont des fossoyeurs.

Le point de départ de l’accusation est l’observation que de nombreux diocèses ont procédé ou procèdent au remembrement paroissial. À l’arrivée du processus, le nombre de paroisses est ordinairement divisé par cinq, par dix, voire davantage. Les terminologies sont variables. Parfois, le nom de « paroisse » est conservé pour chacun des clochers. Cela ne doit pas masquer le fait que, dans

la plupart des diocèses ruraux, l’unité de base est constituée par cinq clochers, dix clochers, voire davantage.

Est-ce par mépris de la paroisse ? Est-ce simplement par manque de prêtres ? Ni pour la première ni pour la seconde de ces deux raisons mais pour deux autres : d’une part, la majorité des communes rurales se sont dépeuplées ; d’autre part, la pastorale d’aujourd’hui (p.189) est beaucoup plus exigeante que celle de jadis. Pensez aux milliers de catéchumènes adultes : ils n’existaient pas. Pensez à la préparation aux sacrements de baptême ou de mariage : elle n’existait pas. Pensez à la comptabilité paroissiale : il faut bien dire que, dans beaucoup de petites paroisses d’autrefois, elle n’existait pas ; aujourd’hui, gare aux inspecteurs des impôts !

Comment voulez-vous que ces fonctions – et tant d’autres, aussi essentielles – soient accomplies par des paroisses microscopiques ?

Dans le diocèse dont je suis l’évêque, cent soixante et onze (171) « paroisses » ont une population inférieure à cent habitants. Des réflexions analogues valent parfois pour les paroisses des centres-villes

anciens, souvent pauvres en population et riches en églises.

La vérité est donc inverse de ce que prétendent vos auteurs : le remembrement paroissial n’a pas pour but de tuer la paroisse mais de la faire vivre. Les ruraux l’ont bien compris, malgré les désagréments de toute adaptation. Ils sont moins immobiles que les citadins, débarquant de temps en temps à la campagne et regrettant de ne pas « avoir » la messe de 11 heures tous les dimanches à moins d’un kilomètre.

Le procès de tendance intenté par Communio aurait eu quelque actualité voilà un quart de siècle (un peu plus ou un peu moins, selon les régions). Aujourd’hui, il est sans intérêt mais non sans nocivité. Il est désagréable d’être traité de sacrilège (fût-ce par inconscience) par d’autres chrétiens. Quant à l’aspect anticlérical de la polémique, il est, lui aussi, suranné : la vie paroissiale renouvelée repose largement – certains diraient même « excessivement » – sur tous les laïcs qui veulent bien s’y engager. Je ne souhaite pas qu’ils soient trop nombreux à lire ce réquisitoire irresponsable.

La citation de l’entretien accordé par le cardinal Lustiger me paraît un abus intellectuel. Ses premières réactions à l’arrivée dans une paroisse datent de 1969 : elles correspondent donc à la période indiquée

plus haut. Quant à l’importance de la liturgie, je ne vois pas aujourd’hui quel prêtre ou quel laïc serait tenté de l’ignorer. Que les réalisations soient trop souvent décevantes ne relève pas du mépris mais de manques dans la formation ou les moyens. Les prêtres d’aujourd’hui ne sont pas plus bradeurs de la liturgie que de la paroisse.

Je recommande à Communio de limiter ses productions aux compétences de ses auteurs : elles sont suffisamment vastes !

 

Jacques Perrier, né en 1936, a été ordonné prêtre en 1964. Aumônier et directeur du CEP de 1964 à 1979, curé de Notre-Dame de Paris, directeur de la catéchèse et de la Pastorale liturgique, il est évêque de Tarbes et Lourdes. – Auteur de diverses publications, dont des Parcours Catéchétiques.


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