Le visage du monde et la figure du Christ

William CONGDON
La confession de la foi - n°1 Septembre - Octobre 1975 - Page n° 60

Le tableau est une nouvelle vie, fils du mariage entre moi et cette chose qui, en me saisissant, s'était conçue en moi comme image. Le tableau est l'image de Dieu dans la création, de Dieu-Personne.  

 

Il est dangereux pour un artiste de parler de l'art, et surtout de son art personnel. Tout discours tend à définir, limiter, réduire à notre mesure humaine. Toutefois, je ne parle pas ici de l'art, mais d'un mystère. Il faut bien distinguer pour commencer le fait de peindre (de la même manière que le menuisier fabrique une chaise), du fait de créer (qui relève de l'art). L'œuvre d'art naît, jaillit d'une rencontre entre moi, artiste, et une certaine chose que j'ai vue, qui me saisit et qui m'appelle par mon nom; ou mieux : qui m'appelle avec la promesse de me donner mon identité. Cet appel irrésistible à aller jusqu'au bout se pose comme amour. Dans ce contexte, comment ne pas penser à Jacob, qui lutta contre l'inconnu pour que celui-ci lui révèle son nom et le bénisse ?

Il ne s'agit cependant pas au fond d'une rencontre avec ce que l'artiste a vu. Une chose en soi ne peut susciter l'amour. Mais la rencontre se fait avec un signe, ' le signe d'une prophétie, d'une promesse, cachée sous l'apparence de l'objet rencontré.

Par exemple, un navire est pour moi un signe. Il porte en lui une promesse de salut, et c'est pourquoi je dis que « j'aime ce navire ». Quand à Brindisi j'ai vu l'Heleanna (un ferry-boat pour la Grèce, incendié il y a cinq ans, et toujours ancré au large du port de Brindisi), quand je l'ai vu brûlé, mort, tout à coup s'est déclenchée en moi la dynamique créatrice. La mort de l'Heleanna était comme ma propre mort, que je devais à tout prix racheter, — c'est-à-dire selon le don rédempteur que Dieu m'a fait : celui d'être artiste.

Le navire en lui-même n'a aucune valeur. Je peux aimer un navire, mais de cet amour ne sortira pas grand'chose. Pourtant, dans la mesure où ce navire apporte un signe prophétique, je dois reconnaître que ce n'est pas moi qui aime, mais que c'est le navire, comme porteur d'un signe de mon destin ultime, qui m'aime et dans lequel je suis aimé. Peindre est ma réponse, mon adhésion à l'amour qui m'a appelé et qui m'engendre. On peut dire que je peins le fait que je suis aimé. Mais n'est-ce pas plutôt le fait que je suis aimé qui me peint ?

Le peintre regarde un objet et le reproduit. L'artiste aussi le regarde, mais avec feuil spirituel qui cherche le mystère. Ce mystère, à l'intérieur de l'objet, possède l'artiste qui, en le peignant, est régénéré dans son être même : l'artiste est [...]

 

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