Version américaine

Depuis plusieurs années, une controverse (qui n'est pas une vaine polémique cléricale) oppose aux États- Unis le rédacteur en chef de l'édition de Communio en langue anglaise aux « néo-conservateurs ». Enjeux: l'Amérique est-elle assimilable par le catholicisme ') Et jusqu'où peut aller l' « inculturation» de la raison ') La question mériterait un examen des historiens et des philosophes, et un ré-examen des deux Conciles du Vatican.

Un débat parfois vif se poursuit aux États-Unis depuis plusieurs années. C'est une controverse spécifiquement américaine. Et pourtant elle nous intéresse à un double titre. D'abord parce que l'un des protagonistes n'est autre que le rédacteur en chef de Communio en anglais. Et puis parce que l'enjeu recoupe le thème de ce centième numéro de l'édition francophone. Tout a commencé par un article de George Weigel, intitulé « L'Amérique est-elle bourgeoise ? » et publié dans le numéro d'octobre 1986 de la revue Crisis. La réponse de l'auteur, président du Centre d'Éthique et de Politique sociale (un « think-tank » de Washington), était négative : les « valeurs » nationales, alliant la générosité à la créativité (et réactualisées dans les années 1980), n'étaient pas uniquement fondées sur un libéralisme cyniquement darwiniste et finalement matérialiste, et avaient une dimension non seulement éthique mais encore proprement spirituelle et même chrétienne. 

La thèse de George Weigel rejoignait celles de Michael Novak, Peter L. Berger et Richard John Neuhaus — autrement dit les théoriciens d'un « néo-conservatisme » qui s'identifie volontiers à un catholicisme pleinement « romain ». Weigel (le plus jeune) et Novak (qui a par exemple collaboré au tout premier numéro de Concilium), sont ouvertement croyants et pratiquants. Neuhaus, pasteur luthérien à l'origine, a été ordonné prêtre catholique pour l'archidiocèse de New York en septembre 1991. 

Dans cette mouvance (où chacun travaille dans son style et son domaine propre), les lettres pastorales des évêques américains, mettant en doute la légitimité de la [...]

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