La croisade

Jacques PAVIOT
Violence et religions - n°251 Mai - Aout 2017 - Page n° 79

L’histoire de la croisade se déploie sur près de deux siècles : conçue, au départ, comme guerre pour la défense de la papauté avec récompenses spirituelles et pèlerinage, puis lutte de la papauté contre ses ennemis de l’Europe et contre les Turcs, la croisade devint pèlerinage armé au secours des chrétiens orientaux, et apparut alors comme guerre pontificale juste. Ce mouvement occidental, spirituel et militaire fut, par la prise de Constantinople, le déclencheur du divorce entre chrétienté latine et orthodoxe.

 

La croisade est l’aboutissement d’une lente maturation de la guerre pour la défense de la papauté accompagnée de récompenses spirituelles et de sa conjonction avec le pèlerinage en Terre sainte, réalisée par le pape Urbain II. L’événement fut la réussite de la première croisade. À partir de là, se sont mis en place les cadres institutionnels de la croisade : la bulle, le voeu, l’indulgence, le pèlerinage armé. Cependant, l’évolution de la conjoncture au Proche-Orient et en Occident en a changé les manifestations pour devenir une lutte de la papauté contre ses ennemis intérieurs, et de l’Europe contre les Turcs. 

Des récompenses spirituelles pour la défense de la papauté

Dès le viiie siècle, quand la papauté se sentait menacée, elle offrait, en contrepartie d’un secours militaire, des récompenses célestes : ainsi Grégoire III à Charles Martel en 739 : « Le Prince des Apôtres (saint Pierre, dont le pape est le successeur) ne te fermera pas l’entrée du Royaume des Cieux » ou Étienne II à Pépin le Bref en 753 : « par le combat que vous mènerez pour l’Église (de saint Pierre), votre mère spirituelle, le Prince des Apôtres remettra vos péchés », lorsqu’il s’agissait de défendre la papauté contre les Lombards. Pour le futur Charlemagne les choses étaient un peu plus simples, comme il l’écrivit au pape Léon III à la suite de son élection au pontificat, le 26 décembre 795 : « À moi il appartient, avec l’aide de la divine pitié, de défendre en tous lieux la sainte Église du Christ par les armes : au dehors, contre les incursions des païens et les dévastations des infidèles ; au dedans, en la protégeant par diffusion de la foi catholique. À vous, très saint Père, il appartient, élevant les mains vers Dieu  vec Moïse, d’aider par vos prières au succès de nos armes… ». 

Un tel « contrat » était valable tant que le roi ou empereur remplissait ses obligations. Quand l’empire carolingien s’écroula dans la seconde moitié du IXe siècle concomitamment avec les agressions extérieures des Normands, des Hongrois, des Sarrasins, le pape revint aux voies anciennes, en précisant de plus en plus les récompenses célestes. En 846, les Sarrasins saccagèrent Rome et Léon IV s’adressa à l’armée des Francs (par-dessus l’empereur Lothaire  Ier), en ajoutant [...]

 

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