Le rédacteur en chef de l’édition germanophone de Communio évoque ici ce que fut le parcours et l’œuvre de Peter Henrici, au service de l’Église et de l’intelligence de la foi.

En mémoire de Peter Henrici

En octobre 2022, Peter Henrici participait encore à une réunion de l’édition allemande de Communio à Munich et présentait quelques réflexions programmatiques sur le profil de la revue. Il est désormais décédé, le 6 juin 2023 à Brig, dans le Valais suisse, à l’âge de 95 ans. Nous perdons avec lui un coéditeur et coordinateur international de la revue de longue date. Son humour d’une grande finesse et sa politesse réservée, semblant à première vue presque farouche, demeurent aussi inoubliables que son jugement sobre et libre de tout préjugé, son ouverture catholique et sa participation amicale au devenir de Communio. Il était né à Zurich en 1928 et avait grandi, avec son frère Andreas, dans une famille aisée aux racines multiples, y compris aristocratiques : « Dans mon arbre généalogique, on trouve la NZZ (Neue Zürcher Zeitung), une usine de fabrication de machines zurichoise, de l’hôtellerie lucernoise et de la haute noblesse hongroise », en fit-il une fois la remarque. Ses parents étaient tous les deux juristes de formation, polyglottes et actifs dans des associations diverses ; ils avaient une orientation œcuménique et étaient socialement engagés. Son père, Georg Henrici, président du barreau de Zurich, fut membre fondateur d’un cercle de discussion œcuménique créé sous l’impulsion de Otto Karrer. Sa mère, Marguerite-Marie Henrici-Pietzcker, exerça la fonction de première viceprésidente de l’International Federation of University Women et, en tant qu’universitaire, s’engagea en faveur du droit de vote des femmes. Avec l’école, où les catholiques étaient, dans la Zurich réformée, une minorité composée d’immigrés, le service de la messe comme enfant de choeur et l’engagement dans le scoutisme furent des expériences marquantes pour le lycéen Henrici. Il vécut les années de la guerre et leurs privations sans jamais se plaindre. Après un baccalauréat obtenu en 1946, il fit d’abord ses études en philologie classique et en langues indo-européennes à l’Université de Zurich. Mais cet intermède ne fut pas de longue durée. Sur une indication de son cousin Hans Urs von Balthasar (1905-1988), qui eut en tout état de cause une influence à ne pas sousestimer sur son chemin de vie, il entra en 1947 dans la Compagnie de Jésus, qui était à l’époque encore interdite mais tolérée, commença ses études de philosophie à Pullach près de Munich, fut répétiteur de philosophie au Germanicum (Rome) de 1953 à 1955, avant d’entreprendre des études de théologie à l’Université de Louvain. Il rédigea sa thèse de philosophie sur L’action de Maurice Blondel et la Phénoménologie de l’Esprit de Hegel. Il fit la distinction entre une dialectique bidimensionnelle et une dialectique...

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