Dans cet hommage, c’est le versant philosophique de l’œuvre de Peter Henrici, particulièrement son intérêt pour Blondel que l’auteur s’attache ici à souligner.

Hommage à Monseigneur Peter Henrici

La petite ville de Brig se cache dans le Haut-Valais, au pied du col du Simplon, à quelques kilomètres de la frontière italienne. Carrefour linguistique en Suisse alémanique, Brig est fière de son histoire. Au début du XVIIe , des religieuses ursulines d’origine française s’y sont installées et ont contribué au rayonnement de la région. C’est auprès de cette communauté apostolique, de spiritualité ignatienne, que Monseigneur Peter Henrici avait choisi de terminer sa vie faisant de cette humble retraite, encore fort active, le symbole de sa vie intellectuelle : polyglotte, lumineuse et féconde. Né à Zurich le 31 mars 1928, Monseigneur Henrici s’est éteint le 6 juin 2023 à Brig. Sa famille comptait d’éminents juristes, cultivés et sensibles à la dimension œcuménique du témoignage chrétien. Entré en 1947 chez les jésuites, comme son cousin Hans Urs von Balthasar auquel il consacrera plus tard nombre d’articles et de traductions, il étudie la philosophie de 1949 à 1952 à Pullach-Munich, puis de 1955 à 1959 la théologie à la Faculté des Jésuites St-Albert à Eegehoven/Louvain. Il se destine d’abord à la théologie. Mais ses supérieurs lui demanderont de s’orienter vers la philosophie. Ses recherches se portent sur le philosophe Maurice Blondel, plus spécifiquement sur un parallèle entre Hegel et Blondel ¹, projetant sur le philosophe allemand la vive lumière de sa concordia discors avec le maître d’Aix-en-Provence. Dans cette confrontation se lit le programme que développera toute l’œuvre scientifique du Père Henrici. Il était certainement le blondélien le plus exigeant, qui a su saisir l’intention fondamentale de cette philosophie ouverte au Don gratuit de Dieu. Attentif à la démarche explicitement phénoménologique de Blondel, Peter Henrici opposait au panthéisme hégélien le panchristisme blondélien, non seulement conciliable avec le surnaturel mais articulable avec lui. L’itinéraire ultérieur du Père Henrici restera fidèle à sa vocation ignatienne, en se déployant au cœur d’une modernité qu’il ne cessera d’interroger de manière critique, tout au long de son enseignement à l’Université Grégorienne de Rome : il y fut de longues années un professeur apprécié et un doyen de la Faculté de philosophie respecté. De 1973 à 1988, il fut membre du comité de direction de la Fédération internationale des sociétés de philosophie. Il fut aussi invité à donner des cours à Munich, Innsbruck, San Francisco, Sao Paulo et Kinshasa. Il participa dès 1982 à l’édition et à la rédaction de la revue internationale catholique Communio. Pour son quatre-vingt dixième anniversaire, la revue lui a consacré un hommage ² en soulignant avec force sa constante.

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 1 Sa thèse soutenue en 1956 fut publiée à Pullach, près de Munich, en 1958

 2 Heinrich SCHMIDINGER, « À Peter Henrici, pour ses quatre-vingt-dix ans », in Communio, XLIII,3-4, no 257-258, 2018, p. 162-166.