Comment représenter, c’est-à-dire rendre présent le Christ ici-bas ? La représentation doit montrer ce qui ne se voit pas, sans faire écran. Il ressort de cette étude que nous ne représenterons bien le Christ qu’à condition de savoir que nous ne Le représentons jamais seuls : la représentation est ecclésiale, en ce double sens qu’elle jaillit d’une vie communautaire et qu’elle y renvoie toujours. Nous ne Le représentons jamais tout entier : il y a une part de manque dans ce que je donne à voir du Christ. La représentation ecclésiale appelle donc ses porteurs privilégiés à l’humilité, à une chasteté authentique dans leur vie relationnelle et à une conversion personnelle permanente.

Au nom de Dieu :

comment représenter le Christ ?

Représenter – rendre présent – le Christ : mission apparemment impossible ! Comment des hommes ou des institutions pourraient-elles prétendre parler et agir au Nom de Dieu ? Qui est légitime pour montrer voire incarner les réalités invisibles, voire Dieu ? D’autant que la représentation de Dieu est d’abord, dans la Bible, un interdit : « Tu ne feras aucune idole, aucune image de ce qui est là-haut dans les cieux, ou en bas sur la terre, ou dans les eaux par dessous la terre » (Exode 20,4 ¹). Avec l’Incarnation, elle devient une possibilité, un art ou un besoin, selon les temps et les lieux : on passe de la question : « Comment dire ce qui ne peut être représenté, ce qu’il est interdit même de représenter ² ? » à : « Comment représenter Celui qui a choisi de Se rendre visible, tangible ? » Basculement radical que résumait saint Jean : « Ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé et que nos mains ont touché du Verbe de vie, nous vous l’annonçons » (1Jean 1,1). La représentation doit montrer ce qui ne se voit pas, sans faire écran ; signaler une absence, sans créer le vide ; instaurer une distance féconde en cela même qu’elle se reconnaît insatisfaisante. Comment représentons-nous le Christ ici-bas ? Par quelles médiations Se rend-Il présent ? Que nous apprennent ces différents types de présences – et donc de représentations – sur l’être chrétien ou la gouvernance ecclésiale ? La question se pose avec d’autant plus d’acuité que, dans ce domaine, des abus atroces ont été mis au jour, et que se profile un synode hors normes sur la manière de vivre en Église (la « synodalité »).

I Le Christ sacramentellement représenté

La logique de l’Incarnation implique des moyens, des signes, des lieux et des moments qui permettent de rendre visible et présent Celui qui est « Dieu-avec-nous » (Isaïe 7,14) : forte des promesses et des commandements de son Seigneur ³, la foi catholique revendique depuis les origines sa capacité à communiquer efficacement et légitimement le salut. Le sacrement, signe par lequel se fait la communication entre Dieu et l’humanité, est efficace, comme moyen et comme début de réalisation du Royaume de Dieu. À parle...

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 1 Traduction AELF : Association Épiscopale Liturgique pour les pays Francophones.

 2 Ibid.

 3 Voir Matthieu 28,18-20 : « Jésus s’approcha d’eux et leur adressa ces paroles : “Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre. Allez ! De toutes les nations faites des disciples : baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit, apprenez-leur à observer tous ce que je vous ai commandé. Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde” ».