Le paradoxe est une figure synthétique de la pensée de Balthasar en tant que développement incessant d’une logique de l’amour. Celle-ci, à tous les niveaux, est « unité de la différence » interprétant les tensions théologiques et anthropologiques présentes dans l’être fini comme une réverbération de l’être infini.

La présence du mystère

Structures paradoxales dans la théologie de H.U. von Balthasar

S’il est impossible de résumer en une seule formule la richesse de la pensée des grands auteurs, il est néanmoins utile de trouver des mots pour exprimer leur physionomie fondamentale. À notre avis, la catégorie du « paradoxe » est particulièrement adaptée pour caractériser la théologie de Balthasar. D’autres catégories peuvent avoir la même extension, mais pas la même intention. Fondamentalement, la pensée de Balthasar est une logique de l’amour, d’où son caractère paradoxal, qui traverse toutes les pierres angulaires de sa pensée. Il assure son fond mystérique qui comporte, dans la confrontation entre l’infinité et la sainteté du Créateur et la finitude pécheresse de la créature, un trait indéfectible d’hyper-tension : « le paradoxe de l’existence consiste à vouloir imprimer quelque chose d’absolu dans le relatif ¹ ». Chez Balthasar, la logique du paradoxe entend également assurer la primauté de l’unité de l’amour en même temps que la consistance de la différence, garantissant ainsi l’indéductibilité et l’irréductibilité des termes en tension, afin d’éviter toute forme de dérivation ou d’absorption. En effet la logique du paradoxe donne une empreinte à toutes les polarités de la pensée balthasarienne : le rapport entre l’Être subsistant et celui non-subsistant, le Dasein et le Sosein de la différence ontologique, la compénétration christologique de la Gloire et de la Croix, la proportion de dépendance et de spontanéité de la liberté chrétienne, les tensions entre la singularité et l’universalité dans les thèmes de la fides Christi et de la « personne théologique ».

Précisons tout de suite qu’entre les deux courants d’interprétation de la notion de « paradoxe » – celui qui l’interprète comme limite et...

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 1 La dramatique divine III, L’Action, Namur,1993. Les textes de Balthasar sont cités d’après la traduction française, La Gloire et la Croix, T.1, Aubier 1965. La Dramatique divine : I Prolégomènes (Namur,1984), II/1 L’homme en Dieu et II/2 Les personnes dans le Christ (Paris- Namur1986 et 1988 : ces deux volumes correspondent aux tomes 2 et 3 de l’édition italienne), III L’Action (Namur 1990 : c’est le tome 4 de l’édition italienne), IV Le dénouement (Namur 1993 : c’est le tome 5 de l’édition italienne). La Théologique I Vérité du monde, (Namur 1994), II Vérité de Dieu, (Namur 1995), III L’esprit de vérité (Bruxelles, 1996).