II reviendra dans la gloire

M. Claude BRUAIRE
Le jugement dernier - n°57 Janvier - Février 1985 - Page n° 4

POURQUOI la venue parousiaque du Christ aurait-elle le Jugement dernier pour, effet et pour but ? On comprend, certes, une nécessaire «simultanéité» puis­que le retour en gloire achève l'Histoire, fin des temps, et que le jugement divin est dès lors sans lendemain, sans pourvoi ni remise possibles. Mais la parole de la foi dit tout autre chose : le Christ reviendra pour juger ultimement tous les hommes de tous les temps. Dès lors, la parousie n'a ni son acte ni son sens sans le jugement qu'elle sera.

Il reviendra dans la gloire

POURQUOI la venue parousiaque du Christ aurait-elle le Jugement dernier pour effet et pour but ? On comprend, certes, une nécessaire «simultanéité» puisque le retour en gloire achève l'Histoire, fin des temps, et que le jugement divin est dès lors sans lendemain, sans pourvoi ni remise possibles. Mais la parole de la foi dit tout autre chose : le Christ reviendra pour juger ultimement tous les hommes de tous les temps. Dès lors, la parousie n'a ni son acte ni son sens sans le jugement qu'elle sera. Comment le comprendre ? L'ultime jugement, au bilan définitif de l'Histoire, ne peut-il s'opérer par nécessité et toute-puissance, hors le retour en gloire qui ne lui doit rien, et qui se passe d'une sorte de manifestation de prestige toute gratuite ? Question implicite en nos représentations qui réduisent aussitôt la gloire du retour à la solennelle majesté du Juge revenant des délibérations pour prononcer un verdict sans appel. Imagerie étrange du pouvoir judiciaire exercé dans l'apparat de ses honneurs et qui semble bien la dérision de Dieu. Mais alors, pourquoi le retour en gloire ? Et nous voici en demeure de connaître la justice de Dieu, qui n'est point la nôtre puisqu'elle n'a son commencement que par la rédemption du Christ. Rédemption par la Croix et la toute-puissance de la résurrection. Rédemption absolument gracieuse qui, par là-même, nous révèle un secret de Dieu qui a nom miséricorde de l'amour infini. Le Christ en gloire, gloire qui est vérité du sacrifice, fait justice miséricordieuse aux hommes, par défaite de la mort, rançon du péché. Mais, du même coup, Dieu s'y révèle dans sa vie éternelle, s'il est vrai que le Fils est venu faire pour nous ce qu'il est, sans nous, en la gloire trinitaire. Ce qui signifie qu'il n'est confirmé par l'Esprit, réaffirmé absolument en son être monogène, que dans la mesure sans mesure où il se rend au Père qui se donne sans réserve en son Fruit éternel. Et, hors nos images trop humaines, c'est ainsi qu'il se manifeste, se révèlera en gloire, à la «fin des temps ». Cette fin des temps est notre introduction en la «plénitude des temps », dans le rythme de l'amour trinitaire. Si bien que la miséricorde rédemptrice répète gratuitement pour nous la reddition éternelle du Fils, associée avec sa glorieuse confirmation. La justice de Dieu n'est miséricorde que par la gloire concluant absolument, sans retour, la parfaite oblation filiale. Les «choses de Dieu » révélées sont ainsi : la justice est miséricorde, qui est glorieuse restitution de la vie du Fils, au temps du don en retour mais sans réserve de son être à sa Source. Toute notre pensée, en la foi et l'espérance, est ainsi invitée à comprendre l'une par l'autre, justice divine et gloire ineffaçable. Sans doute, mais ne préjugeons-nous pas ainsi d'une infinie miséricorde, conclusive de l'Histoire, expressive de la gloire de l'amour ? Le jugement n'est-il point partage, alors qu'il est ultime, sans appel ? Ce partage n'est-il point exclusion de la miséricorde pour les damnés, comme le dit le beau texte de Matthieu, au chapitre 25 ? L'exclusion, le partage, sont bien le sens décisif du jugement dernier, mais il nous est dit, au même texte, autre chose : le jugement suppose l'adoption, c'est-à-dire l'identification, toute de grâce elle aussi, au Christ lui-même : «c'est à moi que vous l'avez fait. » Identification du plus pauvre, du plus infirme, du plus petit. Car le Fils adopte ce qui lui ressemble, ce qui est à l'image réelle de sa vie éternelle d'adoration, de sacrifice. Et c'est nous qui préjugeons, décidons de notre misère ou grandeur. Il faut sans doute laisser à Dieu ce soin, dès lors que nous sommes tentés de juger à sa place, de précipiter les autres en enfer, sans nous rappeler que le sens clair du refus du don de Dieu, c'est de nous y précipiter nous-mêmes. Dès lors, nous présumant innocents, dignes d'être «bien jugés », nous méprisons la miséricorde refusée aux autres, à notre tribunal sans gloire. Laissons à l'amour miséricordieux la liberté absolue de son jugement : notre espérance est alors d'en bénéficier, sans que nous y ayons droit, lors de la venue du Christ en gloire, nous associant adoptivement à son éternelle exaltation spirituelle


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