À propos du célibat sacerdotal

Le célibat des prêtres es objet de débats. Mais l’histoire montre qu’il s’impose dès les temps apostoliques et qu’orthodoxes et chrétiens d’Orient n’y sont pas moins attachés que l’Église romaine. La continence s’avère en fait inséparable de l’obéissance et de la pauvreté. Ces exigences ne sont pas réservées à la vie monastique et concernent a fortiori ceux qui répondent à une vocation sacerdotale. La chasteté du prêtre comme instrument du dessein de Dieu peut même être inspirée par la virginité maternelle de la Mère de Jésus.

Début mars 2017, dans un entretien à l’hebdomadaire allemand Die Zeit, le pape François n’a pas écarté l’idée de discuter de la possibilité de confier certaines fonctions pastorales aux viri probati – ces hommes mariés ou veufs qui « ont donné la preuve » d’une foi solide et sont devenus diacres – pour répondre à la pénurie des vocations dans certaines régions, mais il exclut l’abolition du célibat obligatoire. Le présent article est une contribution au débat ouvert par le Saint-Père. 

Les affaires médiatisées de pédophilie et de prêtres qui annoncent qu’ils se marient sont des occasions de remettre en cause le célibat des prêtres.

Les arguments pour et contre sont bien connus. La défense est plutôt idéaliste ou du moins fondée sur des principes : c’est une exigence portée par la théologie selon laquelle le prêtre agit in persona Christi capitis. Or le Fils de Dieu est venu pour être « tout à tous » et non pour mener une existence ordinaire. C’est avec sa Mère qu’il a une relation privilégiée, et non avec une femme qui lui donnerait des enfants. C’est aussi avec ceux qu’il envoie afin qu’ils fassent partager à d’autres la condition filiale à laquelle il les associe. Cette dynamique qui s’origine dans les échanges au sein de la Trinité divine n’est pas réductible au modèle d’une relation sexuée qui ne peut en être qu’une manifestation parmi d’autres dans le sacrement du mariage¹. Le célibat sacerdotal a de plus une qualité prophétique : il témoigne de ce que Dieu suffit à occuper une vie comme ce sera le cas dans l’éternité bienheureuse². Il a aussi une portée pratique : l’absence de liens familiaux rend plus disponible (saint Paul l’a bien dit³). 

Mais la contestation se veut encore plus réaliste. D’abord dans une perspective comparatiste : le célibat n’est pas un dogme, mais une règle qui n’a été adoptée qu’assez tardivement dans la seule Église latine ; Rome ne l’impose pas aux Orientaux qui lui sont unis et pas davantage aux ministres protestants et anglicans qui la rejoignent ; et l’orthodoxie ne l’exige que des moines et des évêques. Ensuite, en se plaçant à un niveau gestionnaire, on avance qu’il y aurait bien plus de prêtres s’ils pouvaient se marier et que l’Église s’en porterait forcément mieux. Enfin, le libéralisme ambiant, qui n’est pas moins moral et sexuel que politique et économique, tend à produire une anthropologie qui déclare la chasteté impossible, voire inhumaine et en tout cas malsaine. Ce qui permet de laisser entendre d’une part que, si les curés avaient leur famille, ils seraient moins refoulés et ne s’en prendraient ni aux femmes ni aux filles ni aux garçons, [...]

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1 Il convient de ne pas mésinterpréter Éphésiens 5, 22-33. Saint Paul ne dit pas que l’union du Christ et de l’Église est modelé sur le mariage humain, mais qu’à l’inverse, la relation entre les époux doit s’inspirer de l’unité entre la Tête (le Christ) et le Corps (l’Église), pour « ne former qu’une seule chair », selon le dessein du Créateur révélé en
Genèse 2, 24 qu’il cite. 

2 Matthieu 22, 30.
3 1 Corinthiens 7, 32-35.