n°224 La Catholique Eglise Novembre - Décembre 2012*


La catholicité n'est pas d'abord ce qui oppose les catholiques aux autres confessions chrétiennes, mais une note caractéristique de l'Église tout entière. Sans que l'expression soit biblique, elle apparaît dès la génération apostolique pour marquer la vocation universelle d'une Église destinée à apporter à tous la vérité du salut donné par Dieu. Constitutif de l'Église dans son ensemble, ce caractère catholique en spécifie du même coup certains traits particuliers ; destiné à tous, il doit être accueilli par chacun.

 

Page Titre Auteur(s)
5 Sommes-nous assez catholiques ? Peter HENRICI
9 La catholicité - Une unité dans la diversité fondée sur le Christ dans l’Esprit Walter KASPER
23 La catholicité de l’Église chez Hans Urs von Balthasar Elio GUERRIERO
33 L’extension catholique selon le premier ouvrage de Henri de Lubac, Catholicisme Michaël FIGURA
49 La catholicité par la primauté Jean-philippe GOUDOT
61 Catholicité et Mission de l’Église Roch KERESZTY
77 Devenir catholique : Newman Olivier DE BERRANGER
87 L’Église, peuple du pardon. Remarques sur la catholicité de Manzoni Pierluigi FIORINI
95 Au lieu de perdition Jan-Heiner TÜCK
107 À Dieu. Une vision inhabituelle des post-modernes Hanna-Barbara GERL-FALKOVITZ

Éditorial : Peter Henrici: Sommes-nous assez catholiques ?

Thème : La catholique Église

Walter Kasper : La catholicité - Une unité dans la diversité fondée sur le Christ dans l’Esprit

L’Église ne peut recevoir sa catholicité que du Christ Lui-même. Mais dès les premiers siècles, des séparations se sont produites en son sein au nom de ce même Jésus Christ. Comment travailler à l’entente avec les Églises séparées sans se diluer dans une catholicité aux contours trop vagues pour rester vraiment catholique ? Pour devenir catholique, l’Église doit accepter d’être, comme le Christ, incarnée dans une époque concrète, inscrite dans une dynamique constante vers la véritable catholicité à la suite des Apôtres et recevoir des autres Églises ce qui peut lui manquer.

Elio Guerriero : La catholicité de l’Église chez Hans Urs von Balthasar

Une Église ne peut être « catholique » que parce que Dieu l’est – Il est Seigneur de l’Univers – et parce qu’en Jésus et dans l’Esprit Saint – les deux mains du Père – cette catholicité de Dieu s’est révélée et donnée au monde. Don de Dieu à l’Église effectué sur la Croix, cette catholicité est à réaliser dans le temps et dans l’espace, en dépit des carences dans le témoignage des chrétiens. 

Michael Figura : L'extension catholique selon le premier ouvrage de Henri de Lubac, Catholicisme

Catholicisme d’Henri de Lubac s’attache à montrer le caractère social, historique et intérieur du christianisme. La catholicité est solidarité universelle de salut et permet à l’Église d’achever l’oeuvre de réunion spirituelle poursuivie par Dieu. Celle-ci concerne même ceux qui, hors de l’Église, ne seront pas sauvés sans elle. Tous les sacrements y participent, de même que l’acte ecclésial d’interprétation de l’Écriture.

Jean-Philippe Goudot : La catholicité par la primauté

Signe d’identité de l’Église aux multiples dimensions, la catholicité a trouvé dans l’histoire une mise en oeuvre institutionnelle à travers la conciliarité, la collégialité et la primauté. Clef de voûte de ces institutions, relié sacramentellement (par l’Eucharistie et l’ordination) à chaque Église locale dont il constitue une donnée interne, le ministère pétrinien porte le souci du tout et de tous. Pour les catholiques, une Église particulière, l’Église dirigée par le Successeur de Pierre, a reçu mission de faire exister l’unité catholique en étant le garant de la catholicité de l’ensemble. Au fi nal, la papauté assume toutes les dimensions de la note de catholicité, non de façon exclusive mais capitale, fontale et originelle.

Roch Kereszty : Catholicité et Mission de l’Église

Le concile Vatican II, en assumant les diverses dimensions de la catholicité reçues de la Tradition, permet de mieux en percevoir les fondements trinitaire et anthropologique. Ces deux aspects, qui recoupent la conception de l’Église comme sacrement, sont intimement liés à sa nature missionnaire. Au total, la catholicité de l’Église se manifestera pleinement dans la transformation eschatologique du monde.

Olivier de Berranger : Devenir catholique : Newman

Comment John Henry Newman, pétri d’une foi évangélique, demanda-t-il à être reçu dans l’Église catholique, le 9 octobre 1845 ? Mené par une exigence intellectuelle rigoureuse dans la recherche de la Vérité et habité par un profond désir de sainteté, il approfondit, par ses lectures et les rencontres qu’il fi t à Oxford, sa compréhension de l’Église une, sainte, catholique et apostolique jusqu’à entrer dans la « plénitude catholique » de l’Église romaine.

Pierluigi Fiorini : L’Église, peuple du pardon. Remarques sur la catholicité de Manzoni

Alessandro Manzoni (1785-1873) aspirait à créer un genre littéraire où le peuple aurait la parole. Pour lui, l’Église, qui accueille des justes et des pécheurs, est le lieu où s’exprime la pleine humanité de l’homme. Son roman Les Fiancés illustre particulièrement sa vision de l’Église : au rebours du monde qui exige un dévouement absolu à la logique de force et de pouvoir, l’Église invite au pardon, à la suite du Christ. Elle se présente comme lieu de l’attention réciproque, où chacun est gardien de son frère. 

Signets

Jan-Heiner Tück : Au lieu de perdition

L’affirmation de foi selon laquelle le Christ a été crucifié et a connu la mort pour nous et nos péchés n’a pas bonne presse aujourd’hui. L’auteur examine les griefs portés : le soupçon de sadisme, la remise en cause du principe même de substitution et donc de tout sacrifi ce, la désaffection vis-à-vis d’un discours qui décrit la faiblesse de l’humanité pécheresse. Il propose enfin une réflexion sur le choix de la croix par lequel Dieu vient se placer aux côtés du pécheur, dans les vicissitudes de l’histoire, jusqu’au lieu de perdition.

Hanna-Barbara Gerl-FalkovitzÀ Dieu. Une vision inhabituelle des post-modernes

Dans le désert postmoderne de l’absence de Dieu, que peut apporter la phénoménologie ? Interrogeant Derrida, Marion et Levinas, l’A. dégage un ailleurs, précise le concept d’événement qui bouleverse et transforme en témoin celui qui l’a vécu, le dépossédant de toute « maîtrise », et s’interroge sur les conséquences de la kénose, du vide de la « mort de Dieu » aussi bien pour la théologie que pour la philosophie. 

Sommes-nous assez catholiques?

Peter Henrici

De même que la volonté de Dieu est un acte et s’appell e le monde, ainsi son intention est le salut des hommes, et elle s’appelle l’Église. Clément d'Alexandrie, Pédagogue, l. 1, c. 6. (PG 8, 281-282)

Le catholicisme [...] est la forme que doit revêtir l’humanité pour être enfin elle-même. Henri de Lubac, Catholicisme, p. 256.

La troisième note de l’Église – « catholique » – n’est certes pas la plus aisément compréhensible. Celui qui se professe, comme catholique, membre de la « sainte Église catholique » met dans cette profession à la fois trop et trop peu. Trop dans la mesure où il a l’intention de professer une identité confessionnelle particulière, en se démarquant des autres Églises chrétiennes ; trop peu dans la mesure où il ne se rend pas compte que tous les chrétiens, quelle que soit leur confession, professent dans leur Credo la catholicité de l’Église (donc de leur Église). C’est pourquoi le titre de notre Cahier fait figurer l’adjectif « catholique » avant le substantif « Église », au rebours de l’habitude : non que l’Église soit plus ou moins catholique de ce fait, mais pour donner à sentir que la catholicité concerne toute l’Église et, en un sens, tous les chrétiens. Toujours est-il que ce constat, qu’une confession singulière revendique comme signe distinctif une note de l’Église que doivent professer toutes les Églises chrétiennes, constitue peut-être le problème ecclésiologique le plus difficile. 

Il est vrai que deux autres communautés ecclésiales se caractérisent elles-mêmes avec un attribut que toutes les Églises chrétiennes professent. Toute Église ou communauté ecclésiale, en effet, se caractérisera elle-même comme « orthodoxe », porteuse d’une foi authentique, et également comme très « évangélique », centrée sur l’Évangile et engagée envers lui. Pourtant ces deux attributs, contrairement à « catholique », ne sont pas entrés dans la profession de foi commune. [...]

 

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* Traduction et adaptation pour l’édition francophone : Denis Dupont-Fauville.

Jan-Heiner Tück : Au lieu de perdition

L’affirmation de foi selon laquelle le Christ a été crucifié et a connu la mort pour nous et nos péchés n’a pas bonne presse aujourd’hui. L’auteur examine les griefs portés : le soupçon de sadisme, la remise en cause du principe même de substitution et donc de tout sacrifi ce, la désaffection vis-à-vis d’un discours qui décrit la faiblesse de l’humanité pécheresse. Il propose enfin une réflexion sur le choix de la croix par lequel Dieu vient se placer aux côtés du pécheur, dans les vicissitudes de l’histoire, jusqu’au lieu de perdition.

Hanna-Barbara Gerl-FalkovitzÀ Dieu. Une vision inhabituelle des post-modernes

Dans le désert postmoderne de l’absence de Dieu, que peut apporter la phénoménologie ? Interrogeant Derrida, Marion et Levinas, l’A. dégage un ailleurs, précise le concept d’événement qui bouleverse et transforme en témoin celui qui l’a vécu, le dépossédant de toute « maîtrise », et s’interroge sur les conséquences de la kénose, du vide de la « mort de Dieu » aussi bien pour la théologie que pour la philosophie. 


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