n°60 La prière du chrétien Juillet - Aout 1985*


La prière fut, dans la modernité, radicalement critiquée: perverse fuite de la réalité, complice objectif de tout conservatisme. Aujourd'hui elle subit une autre menace, moins visible, plus dangereuse:elle se résumerait en une postulation, parmi d'autres de la psyché de l'homme. Prier, ne serait-ce pas simplement pour l'esprit - s'exprimer, s'inspirer?  La prière du chrétien échappe à cette réduction. Le chrétien en priant ne se met pas à l'écoute de son propre esprit. Il parle à un Autre qui plus originellement lui parle et demeure en lui. Le chrétien prie comme et avec le Christ : en direction du Père et dans l'inspiration de l'Esprit. Donc il ne peut pas prier hors de l'Eglise, ni contre elle.

Page Titre Auteur(s)
4 La prière du chrétien Claude BRUAIRE
7 « Par lui, avec lui, et en lui » Hans Urs VON BALTHASAR
21 Le milieu ecclésial Georges CHANTRAINE
39 Dimension communautaire et personnelle Jan AMBAUM
45 Le Dieu unique et l'intercession des saints Gerhard LUDWIG MÜLLER
63 Un devoir ontologique Anton E. VAN HOOFF
78 L'expérience des mystiques Jan-Hendrijk WALGRAVE
93 La foi, chemin de l'oraison François RETORÉ
107 Prière continuelle ou prière exclusive - Le cas des messaliens Antoine GUILLAUMONT
113 L'humilité selon saint Bernard Jean-louis CHRÉTIEN
128 La Madeleine au pied de la croix Dominique PONNAU

Claude Bruaire: La prière du chrétien

Problématique

Hans-Urs von Balthasar : « Par lui, avec lui, et en lui »

La prière devient chrétienne parce qu'au mouvement, lui naturel, d'une parole d'homme vers la divinité, s'ajoute une parole de Dieu vers l'homme — le chrétien écoute Dieu lui parler. Plus, la parole échangée devient elle-même une personne — le Verbe fait homme, priant le Père, prié des hommes ; la prière devient chrétienne en intégrant l'orant dans le rôle et la chair du Christ.

Georges Chantraine, s.j. : Le milieu ecclésial

La vie spirituelle est un long itinéraire, et toujours l'Eglise a souligné que nul ne pouvait le parcourir seul. Chaque croyant progresse dans le milieu communautaire. Mais comment se manifeste-t-il concrètement ? La notion d'accompagnement peut-elle et doit-elle remplacer celle de direction spirituelle ? La communion des saints ne définit-elle pas d'abord la communauté spirituelle ?

Jan Ambaum : Dimension communautaire et personnelle

La prière personnelle du chrétien a-t-elle moins de valeur que la prière communautaire de l'Eglise ? En réalité, toute prière n'est chrétienne qu'adressée à Dieu par le Christ, et c'est ainsi qu'elle s'accomplit dans la communion de l'Eglise : le croyant ne se tient jamais seul devant Dieu.

Gerhard Ludwig Müller: Le Dieu unique et l'intercession des saints

Pourquoi prie-t-on les saints ? Ne suffit-il pas de prier Dieu ? En demandant l'intercession des saints — qui par leùr humanité accomplie participent au mouvement de l'amour de Dieu pour les hommes — nous les invitons à prier Dieu avec nous : ainsi se réalise la communion entre Dieu et tous les rachetés.

Intégration

Anton Van Hooff, o.s.b. :Un devoir ontologique

Le philosophe lui aussi doit parler de la prière : elle est pour lui une possibilité positive, caractéristique de l'homme, dans laquelle il trouve l'accomplissement de la logique de son action et reçoit de Dieu le don le plus libre.

Attestations

Jan-Hendrik Walgrave, o.p. : L'expérience des mystiques

La prière est un chemin vers Dieu : la vie des mystiques atteste cette pédagogie divine qui conduit de la méditation à la contemplation, expérience immédiate de Dieu dans l'union, où l'orant est dépouillé de tout pour recevoir la vie divine.

François Retoré : La foi, chemin de l'oraison

Au-delà de la sensibilité, la prière est la rencontre de deux amours dans la foi, « bien que de nuit » — pour une infusion d'amour, dans le secret jusqu'à la sainteté.

Antoine Guillaumont : Prière continuelle ou prière exclusive? Le cas des messaliens

La prière est l'activité essentielle de la vie religieuse, encore ne doit-elle pas être privilégiée de façon absolue ni exclusive, au détriment des sacrements et au mépris de la prière de l'Eglise ainsi que de toute activité utile, tel le travail manuel.

Signet

Jean-Louis Chrétien : L'humilité chez saint Bernard

Pour accéder à l'humilité, il ne suffit pas que je recon­naisse ma «bassesse » devant Dieu ; il faut que je recon­naisse que mon humilité n'est rien devant l'humilité infinie de Dieu, qui a choisi volontairement de devenir mon humanité. L'humilité, ce rien qui change tout, définit seule le lieu de toute autre vertu, parce qu'elle seule reconnaît que Dieu est Dieu.

Couverture

Dominique Ponnau : Madeleine au pied de la croix

Ce tableau très pur, très simple, très profond est un témoignage exceptionnel non seulement du génie de l'artiste mais de la foi de l'Eglise en France au XVIIe siècle. Il n'a pu être peint que dans la prière. A tous ceux qui aujourd'hui le regardent, croyants ou incroyants, au Musée de Saint-Denis, il propose la foi en l'homme transfiguré par l'amour.

La prière du chrétien

Claude Bruaire

« C'est Dieu qui fait tout ». Sainte Thérèse d'Avila (Chemin de la perfection, 41).

Le chrétien ne prie pas comme les autres ; il ne le peut. Non que sa parole soit limitée dans son acte, dans son énergie spirituelle ou dans l'invention des mots, mais parce qu'il prie un Dieu qui est lui-même, pour lui-même, Parole — une Parole qui exprime sans reste l'être divin.

Car il n'y a pas de chrétien sans la première leçon reçue de la Révélation : Dieu n'est pas le divin muet, l'absolu ineffable, inaccessible au langage, ou l'au-delà inexprimable du sens de ses propres paroles. Un tel Dieu ne saurait être prié, sinon par un rituel de mots préparant leur effacement en une lumière qui se confond avec la nuit. Si le verbe est au commencement, si en lui se donne absolument l'être en son origine, cela veut dire que le silence est athée, lui qui prétendrait imposer sa loi au divin. Telle est bien la joie de cette première leçon des «choses de Dieu » apprise de Dieu lui-même : sa parole le dit en vérité ; elle comble en vérité l'attente de l'esprit qui cherchait le Dieu inconnu et préjugeait de toute la force de son désir que ce n'était pas le Dieu inconnaissable.

Les mots et les actes du Christ expriment sans la condescen­dance de propos aléatoires, qui seraient une dérisoire pseudo-révélation, l'être du Fils, Fruit unique où passe toute la sève paternelle. Mots divins qui emportent l'être en sa parfaite expression. C'est bien pourquoi le Christ n'a rien d'autre à dire que le Père. C'est bien pourquoi, aussi, il n'a de secret propre que pour le prier, se rendre à lui en échange, manifestant en sa reddition amoureuse l'absolu don qu'il est lui-même en retour.

Le chrétien ne confesse l'adoption divine qui le constitue comme tel qu'en imitant par sa prière la prière du Christ. Jésus ne nous apprend Dieu qu'en nous apprenant à prier son Père,intégrant l'oblation filiale par laquelle il n'exprime en nous divinement la gloire de Dieu que par l'abnégation de lui-même. Ainsi le chrétien est bien comme un «petit Christ » quand sa prière est répons; action de grâce.

Recueillir tout notre être dans le secret, creuset de toute fer­veur pour une commune prière, c'est la conversion intime où Dieu attend nos mots, au plus intérieur de notre esprit. Et cette conversion est la seule vérité du silence d'où se murmurent les premiers mots avec l'audace permise par le don de l'adoption. Le silence est pour la prière, non pour le prétendu «dépasse­ment » vers l'inconnu. Dès lors, la moindre prière contient tout notre esprit se donnant à Dieu. Don en retour du don que nous sommes, du don où le Créateur, avec l'infinie discrétion de sa générosité, s'était fait mystère de notre origine, anonymat du don de l'être. [...]

 

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Signet

Jean-Louis Chrétien : L'humilité chez saint Bernard

Pour accéder à l'humilité, il ne suffit pas que je recon­naisse ma «bassesse » devant Dieu ; il faut que je recon­naisse que mon humilité n'est rien devant l'humilité infinie de Dieu, qui a choisi volontairement de devenir mon humanité. L'humilité, ce rien qui change tout, définit seule le lieu de toute autre vertu, parce qu'elle seule reconnaît que Dieu est Dieu.

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Dominique Ponnau : Madeleine au pied de la croix

Ce tableau très pur, très simple, très profond est un témoignage exceptionnel non seulement du génie de l'artiste mais de la foi de l'Eglise en France au XVIIe siècle. Il n'a pu être peint que dans la prière. A tous ceux qui aujourd'hui le regardent, croyants ou incroyants, au Musée de Saint-Denis, il propose la foi en l'homme transfiguré par l'amour.


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