Le secret d’une perpétuelle jeunesse

Avec sa sveltesse, son oeil clair et son cheveu ondulé, rejeté en arrière et à peine grisonnant, le P. Georges Chantraine eut l’air jusqu’au bout d’un perpétuel jeune homme. L’enthousiasme et le dynamisme que suggérait cette silhouette étaient tempérés, dans le comportement et dans l’expression, par une lenteur précautionneuse où transparaissaient l’intensité de la réflexion et la détermination des engagements.

C’est à l’époque où venait de paraître son « Mystère » et « Philosophie du Christ » selon Érasme¹ qu’il fut présenté à Montmartre, chez Mgr Maxime Charles, au groupe de normaliens auxquels celui-ci avait confié sa revue Résurrection et qui devaient, quelques années plus tard, faute qu’il ait été trouvé des gens plus mûrs, assurer le lancement de l’édition française de Communio. Le « parrain » de cette rencontre était le P. Louis Bouyer (1913-2004), qui suivait déjà avec sympathie les efforts de Résurrection. À ses yeux, le travail du jésuite belge sur l’humaniste de Rotterdam (1469-1536) constituait une référence, en prolongement de sa propre étude sur le catholicisme de la Renaissance², et donc sur les premiers et décisifs affrontements entre la tradition chrétienne et la « modernité ». [...]

1. Bibliothèque de la Faculté de Philosophie et de Lettres de Namur, 1971, 410 pages.

2. Autour d’Érasme, Cerf, Paris, 1955, 196 pages. L’ouvrage du P. Chantraine est encore mentionné par le P. Bouyer dans Le Métier de théologien (1979 ; nouvelle édition augmentée, Ad Solem, Genève, 2005, page 202).