Trois textes sur la sépulture

Lettre de consolation sur la mort d'un ami qui n'a pas reçu de sépulture, avec des considérations sur les rites funèbres.

Je compatis à ta douleur d'avoir perdu un ami si précieux, mais je m'indigne plus encore de t'avoir vu perdre en cette occasion la netteté de ton jugement : ou bien tu ne mets pas assez de force d'âme, et moins encore de philosophie, dans la consolation que tu te donnes, ou bien tu ne pleures pas ton ami de la façon dont tu le devrais, — si du moins l'on ne considère la mort d'un homme de bien comme digne d'en- vie plutôt que de pitié. Pour résumer le sens de ta lettre, il me semble que tu y déplores moins la perte que tu as subie ou la mort prématurée de ton ami — en quoi je pourrais comprendre une erreur sans doute répandue —, que la façon dont il est mort et l'offense faite à son corps de n'avoir pas de sépulture, cadavre livré au gré de la mer égyptienne. Cette plainte tout juste digne du peuple, cette plainte de bonne femme plutôt, j'ai du mal à la supporter. Dis-moi, ne t'est-il pas venu à l'esprit, toi que tourmente à ce point le genre de la sépulture, que « c'est une perte légère que celle d'un tombeau » ? Ou bien as-tu oublié le vers de Virgile — qui n'affirme rien d'autre —, quand les enfants eux-mêmes le connaissent et qu'il est depuis longtemps passé en proverbe ? Que si tu te tournes vers la mort, tu te tromperas en pensant que c'est elle qui nous fait heureux ou malheureux ; on le connaît assez, ce vers d'un autre poète : « Ce n'est pas la mort qui nous fait malheureux. » [...]

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