La tradition conciliaire aux États-Unis. De Rome à Baltimore, et retour

La transition d’une Église nord-américaine de mission à une Église installée s’est faite, tout au long du XIX^e siècle, par le recours à plusieurs conciles provinciaux et pléniers. Tenues à Baltimore, ces assemblées synodales ont légiféré pour tout ce qui concerne la vie concrète des catholiques américains, associant largement les laïcs à l’administration des paroisses mais valorisant aussi le lien juridique et spirituel avec le Saint-Siège. Par ce double aspect, elles constituent un exemple éclairant pour l’Église actuelle.

Comment construire l’Église dans des terres de missions situées loin au-delà de l’océan atlantique, dans un État neuf, surgi de la décomposition de trois empires coloniaux et dont le corps social est pour l’essentiel hostile au catholicisme ? Les termes du problème indiquent la complexité de l’entreprise.

On estime que dans les années 1755-1760, pour les colonies qui deviendront les États-Unis, une quinzaine de prêtres dessert une quinzaine de milliers de fidèles, d’origine anglaise pour la plupart, répartis entre les missions du Maryland, de la Pennsylvanie et de New York. En 1773, la Compagnie de Jésus, qui offrait dans les colonies nord-américaines la première structuration ecclésiastique, est supprimée. En 1783, la reconnaissance de l’indépendance des États-Unis par l’Angleterre suspend le fragile lien hiérarchique qui existait entre le vicaire apostolique de Londres et les catholiques dispersés dans les colonies devenues États. Pendant la courte décennie que dure le processus révolutionnaire (1773-1783), il n’y a plus en conséquence ni évêque, ni ordinaire, ni ordre religieux dans la jeune nation.

Après la reconnaissance de l’Indépendance des États-Unis, on observe timidement les signes de la réimplantation de l’Église. En 1784, Pie VII désigne comme « préfet apostolique » le P. John Carroll, jésuite, originaire du Maryland, qui, en 1789, avec le consentement de Rome, est élu premier évêque des États-Unis. Son siège épiscopal est Baltimore. À l’échelle fédérale, la constitution de 1787, sans être favorable au catholicisme, le rend possible. Le désétablissement des Églises et la liberté religieuse sont adoptés dans le Bill of Rights de 1791, et notamment dans le 1er amendement : « Le Congrès ne fera aucune loi qui touche l’établissement ou interdise le libre exercice d’une religion. » C’est dans ce moment de renaissance que « Baltimore » va devenir le lieu symbolique de la structuration du catholicisme aux États-Unis. Le « Synode de Baltimore » s’y réunit en 1791. Sept « conciles provinciaux » (1829-1849) puis trois « conciles pléniers » (1852-1884) se tiennent dans la cité du Maryland et [...]

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