La synodalité dans la tradition anglicane

La rupture avec Rome a conduit l’Église d’Angleterre a trouver d’autres chemins de gouvernance permettant à ses fidèles de demeurer unis dans la diversité de leurs sensibilités pastorales et doctrinales. L’influence du Parlement a d’abord été décisive, mais le recours à des assemblées synodales s’est progressivement généralisé en vis-à-vis du pouvoir politique, les plus célèbres étant les conférences de Lambeth.

1. Ensemble sur le même chemin

Le document publié en 2018 par la Commission théologique internationale, (CTI) « La synodalité dans la vie et la mission de l’Église », a ouvert la voie au pape François pour souligner la centralité de ce concept pour le renouveau de l’Église – une centralité qui doit s’affirmer au Synode mondial des Évêques prévu l’an prochain. Ce document a insisté à juste titre sur la nécessité de mettre cette notion apparemment abstraite d’ecclésiologie en relation avec ses origines dans les Écritures – et en particulier ce qui est dit de Jésus-Christ comme hodos, « le Chemin ». Les Actes des apôtres (par exemple 9, 2 ; 22, 4 ; 23, 2) nous apprennent que la foi chrétienne a été elle-même appelée « le Chemin » dans ses commencements : être chrétien, c’est suivre le chemin que prend le Christ en montant vers son Père qui est aussi le nôtre (Jean 20, 17). Au début du IIe siècle, comme le signale le document de la CTI, Ignace d’Antioche dit aux Éphésiens dans la Lettre qu’il leur adresse (9, 2) qu’ils sont des synodoï, des voyageurs qui cheminent ensemble sur le hodos d’amour que le Christ a ouvert pour eux, avançant en procession solennelle, comme dans les cérémonies païennes où l’on promenait les images des dieux : eux aussi sont porteurs de la divine image, mais l’image qu’ils portent sur leur parcours est celle de l’amour du Sauveur incarné. De même, dans un apocryphe ancien (les Actes de Thomas, 103), le Christ lui-même est désigné comme synodos, compagnon de route. Ce mot – et son dérivé synodia – a été plus tard utilisé dans le culte des assemblées chrétiennes et, dans un contexte fort différent mais non sans rapport, il a pu désigner l’union de la divinité et de l’humanité dans la personne du Christ (ainsi chez Grégoire de Nazianze, Discours, 30, 8). Un synodos est une union dans un flux continu d’actions conduisant à la source de tout, c’est-à-dire le Père éternel. Le Fils incarné rend possible ce mouvement et lui donne sa forme. L’Esprit répandu sur les croyants fait d’eux des « compagnons de route » et des images du Christ dont le cheminement vers le Père passe par le mystère pascal de croix et de résurrection qui s’actualise quotidiennement dans la vie des baptisés – et qui est à la fois proclamé et intensifié dans l’eucharistie [...]

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