Cardinal Josef RATZINGER
l'intelligence artificielle
-
n°301
Septembre - Octobre
2025 - Page n° 113
Pensée et développée pour protéger l’homme face aux menaces des forces naturelles, la technique a généré en retour de nouvelles menaces, non seulement envers l’environnement, mais aussi et surtout à l’encontre de la liberté et de la responsabilité humaines. Écrit en 1982, quarante ans avant l’apparition de ChatGPT, cet article montre de manière prophétique l’urgence d’une intégration de la « raison éthique » dans la « raison technique », pour que la domination de l’homme sur le monde le conduise, non à posséder plus, mais à être plus.
e fait qu’un théologien parle de questions de sécurité technique peut sembler à première vue étrange et étranger à son domaine de compétence : la sécurité, en tant que paramètre des constructions techniques, est un problème à résoudre techniquement, et auquel seul le technicien peut apporter une contribution concrète ; mais on pourrait ajouter immédiatement ceci : si la sécurité apparaît comme un problème technique et à résoudre par la technique, c’est parce qu’auparavant la sécurité se présente à la technique comme une tâche éthique. Si on part de là, on saisit mieux l’intérêt de la question très générale du rapport entre éthique et technique.
Dans la première phase du développement de la technique moderne, la question ne semblait guère se poser. Le savoir-faire était considéré comme un pouvoir, voire un devoir, qui n’avait pas à être limité de l’extérieur par des objections morales qui lui étaient « étrangères ». La technique se justifiait comme la mise en œuvre des capacités humaines et de la liberté humaine elle-même. Utiliser librement l’esprit jusqu’à la limite de sa capacité et sans autre limite que celle-ci, c’est ainsi que se manifestait précisément la nature morale de l’homme. S’accomplir soi-même, être libre de connaître et d’agir à partir de la connaissance, sans tabou ni interdiction, telle était la nouvelle morale. Celle-ci devait être justement l’émancipation des contraintes et des peurs ancestrales déguisées en morale, pour accéder à l’autonomie de l’homme soumis à la seule logique des Lumières scientifiques. La technique et la physique avaient pour ainsi dire « absorbé » l’éthique. « La pensée scientifique et technique peut en effet nous libérer de la domination que la nature exerce sur nous, dans la mesure où elle nous permet de dominer la nature. La morale traditionnelle, orientée vers les notions de bien et de mal, n’a pas pu apporter cette libération. Elle a pâli face à la réalité éclatante de cette libération. Puis elle est apparue superflue et finalement gênante et « réactionnaire ». La libération elle-même est apparue comme une nouvelle moralité ; « l’Aufklärung » scienti ...
Prix HT €* | TVA % | Prix TTC* | Stock |
---|---|---|---|
13.71€ | 2.10% | 14.00€ | 50 |