n°64 Les Immigrés Mars - Avril 1986*


La violence est souvent le refuge de l'incompétence. Pour ne pas se laisser piéger et prendre de la hauteur, il faut descendre dans les fondements pour savoir de quoi et de qui nous parlons, pour analyser et critiquer les arguments affichés. Ainsi se révèle l'inconsistance de bien des thèmes, comme celui de la menace sur l'emploi ou de l'invasion démographique et culturelle. On peut alors remonter à la surface pour se demander si nous recherchons le bien commun dans la justice et si nous sommes capables de vouloir avec conviction et sagesse un projet commun de vie, fondement d'une véritable unité nationale.

Page Titre Auteur(s)
7 Faits ou arguments? Thierry BERT
27 Une chance pour les croyants Jean-Robert ARMOGATHE
34 Le mien, l'étranger et l'universel Olivier BOULNOIS
46 Christianisme et culture. Quelques remarques de circonstance Rémi BRAGUE
64 La rencontre des religions André MANARANCHE
77 Vouloir vivre ensemble. Rappels historiques Émile POULAT
88 Les étrangers, les droits et le droit Marc FORNACCIARI
98 Aimer les étrangers et aimer son pays Arnaud de VAUJUAS
108 Un haut-lieu du dialogue missionnaire Bernard TERRIEN
120 Qui a encore besoin du droit canonique ? Patrick LE GALL

Editorial

Problématique

Thierry Bert : Faits ou arguments ?

Jean-Robert Armogathe : Une chance pour les croyants

Face à l'étranger son voisin, le Français, s'il est chrétien, ne peut que se demander où et même si lui-même est réellement a chez lui. En même temps qu'un défi, l'immigré est donc pour nous une chance, dans la mesure où il nous rappelle notre situation spirituelle de pélerins sur cette terre.

Olivier Boulnois : Le mien, l'étranger et l'universel

La perplexité actuelle autour de l'immigration provient de la confusion de trois logiques, dont chacune est valable à son niveau : la préférence du propre régit l'économique, la reconnaissance de l'universel définit le juridique ; au-delà de l'ordre politique, la prédilection envers le prochain est la loi qui exprime l'ordre de la charité.

Rémi Brague : Christianisme et culture. Quelques remarques de circonstance

La révélation chrétienne relativise toute culture, ainsi que leur diversité. Une société pluri-culturelle ne peut être politique ; la seule véritable est l'Église, qui accueille toutes les cultures et les appelle à la conversion. L'Europe présente cette particularité que le caractère second de la culture (par rapport à l'Antiquité) est explicitement su et voulu. Parce qu'elle se sait secondaire dans son rapport à l'Absolu (par rapport à l'Ancienne Alliance), l'Eglise peut appeler l'Europe à demeurer ouverte à l'universel, et capable d'entraîner ceux qui y vivent dans un mouvement qui la dépasse.

André Manaranche : La rencontre des religions

La question de l'immigration a aussi, sinon d'abord, une dimension religieuse : la rencontre du catholicisme avec l'Islam. Pour qu'une telle rencontre ne répète pas les affrontements dommageables du passé, il faut sans doute développer le dialogue, et la connaissance réciproque. Mais pour qu'elle ne se solde pas par un recul des chrétiens, il faut avoir la lucidité d'une question : le catholicisme, en France, croit-il assez en lui-même, et croit-il assez à la  divinité trinitaire de son Christ?

Intégration

Émile Poulat : Vouloir vivre ensemble. Rappels historiques

L'étranger immigré d'aujourd'hui n'est plus tout à fait l'aubain du Moyen-Age, parce que le monde a changé : il a pris conscience de ses dimensions et de ses divisions. L'Eglise ne parle plus au sein d'une chrétienté. Elle a dû tirer de sa doctrine un discours nouveau, condamnant également les nationalismes et l'internationalisme, pour promouvoir simultanément le patriotisme, la fraternité universelle et les droits de la personne humaine.

Marc Fornacciari : Les étrangers, les droits et le droit

Les droits des étrangers sont l'objet d'une bataille juridique. Quels sont les principes généraux du droit en ce qui les concerne, et que peut-on en tirer? Notre tradition juridique nous interdit d'adopter n'importe quelle mesure sur les prestations sociales, le regroupement des familles, ou même l'acquisition de la nationalité française.

Attestations

Arnaud de Vaujuas : Aimer les étrangers et aimer son pays

L'aide concrète que les organismes ecclésiaux portent aux immigrés les plus démunis n'exclut pas la lucidité chez ceux qui sont à leur contact, mais la renforce plutôt : ce n'est pas vouloir le bien véritable des assistés que de leur faciliter une situation en marge des lois. Mais tout homme, quelle que soit sa situation juridique, reste image de Dieu. L'Eglise doit le rappeler constamment, dans sa pratique comme dans sa prédication, qui dépasse les frontières nationales.

Bernard Terrien : Un haut-lieu du dialogue missionnaire

Comment proposer la foi chrétienne à ceux qui lui sont étrangers? A la question des moyens répond celle du lieu : le Sacré-Coeur de Montmartre en est un. Il attire par milliers des visiteurs qui y découvrent, grâce au dialogue missionnaire qu'engagent avec eux les chrétiens qui les accueillent, la vocation religieuse de ce haut-lieu et la leur propre.

Qu'attendez-vous de l'Eglise ? — Réponses de Jean Bornard, président de la Confédération Française des Travailleurs Chrétiens, Yvon Chotard, vice-président du Conseil National du Patronat Français. André Diligent, sénateur-maire de Roubaix.

Signet

Patrick Le Gal : Qui a encore besoin du droit canonique ?

On ne trouvera pas ici un dossier technique sur l'immigration. Un tel projet ne correspondrait pas à la vocation de notre revue. Il ne correspondrait pas davantage à un besoin.

Le débat sur l'immigration a pris en France dans cette période pré-électorale la dimension d'un enjeu. Comme toujours dans ce cas, la presse offre à ses lecteurs une masse considérable de faits, d'arguments, de chiffres, souvent interprétés ou construits autour des thèses qu'il convient de défendre, mais qui, dans leur matérialité, sont souvent exactes.

Ce qui nous importe est de situer l'enjeu du débat et ses sous-entendus. Avant de pouvoir prendre, comme on dit, une « position chrétienne» sur le problème, encore faut-il pouvoir prendre une position tout court, c'est-à-dire percevoir les tenants et les aboutissants du discours, souvent caché, qui émerge, telle une logique inconsciemment reconnue, des faits qui sont présentés. C'est cette logique qu'il convient de juger à l'aune de certains principes.

Les faits bruts ne représentent rien. Nous ne pouvons pas, à chaque fait divers, relever que tel crime est «raciste» ou, a contrario, que telle prise d'otages d'un tribunal entier par un Marocain est une conséquence directe de la politique menée en matière d'immigration, sans nous interroger sur le droit qui est le nôtre de formuler de pareils jugements.

Trois tentations sont dès lors à éviter. L'angélisme n'est pas de mise. Il y a un vrai problème en ce sens que la population de ce pays le ressent comme tel. [...]

 

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