À la recherche du beau et du convenable en médecine palliative

M. Louis-André RICHARD
La paix - n°257 Mai - Aout 2018 - Page n° 153

L’évolution des sciences et de l’art médical qui bouleverse nos manières de concevoir la fin de nos existences entraîne une modification du rapport politique à la mort, apparemment inéluctable. Cette modification comporte-t-elle plus d’avantages que d’inconvénients dans le développement de nos sociétés contemporaines ? Il s’agit de débusquer les pièges pour mieux cadrer la réflexion portant sur la fin de vie.


« Beauté, c’est la dernière aventure où la raison raisonnante puisse se risquer » Hans Urs von Balthasar

Depuis ses origines, la philosophie construit sa réflexion politique et anthropologique par rapport à la mort. Une des plus vieilles définitions de la philosophie, proposée par les Grecs, se traduit littéralement comme une pratique de la mort. À la suite de Cicéron, Montaigne affirme que philosopher c’est apprendre à mourir. Il dit encore que la mort est bien le bout et non le but de la vie. L'homme se sait mortel : cruelle certitude qui limite son horizon et l'oblige à composer avec sa propre disparition, comme avec celle des êtres auxquels il est attaché.

L’humanité, depuis ses origines, a dû s’accommoder de trois réalités structurant son être au monde, à savoir : Dieu, l’amour et la mort. Les civilisations en portent la trace sous la forme de grands invariants de la condition  humaine1. Les communautés politiques, quelles qu’elles soient, gardent les trois coutumes suivantes : toutes ont une religion, toutes contractent solennellement des mariages, toutes ensevelissent leurs morts. Chez toutes les nations, les plus « primitives » soient-elles, il n’y a pas de manifestation qui ne soit célébrée avec plus d’éclat que les cérémonies religieuses, les mariages et les enterrements. C’est dire l’importance d’une réflexion sur notre condition mortelle dans la quête légitime du bonheur ou de la « vie bonne ».

À notre époque, cette recherche d’accommodement passe, entre autres, par l’univers de la médecine palliative. Nous parlons alors de fin de vie, de soins respectant la dignité et l’autonomie des mourants, d’euthanasie comme de suicide assisté, d’acharnement thérapeutique ou de sédation terminale … Ce vocabulaire porte la trace d’une sorte de métamorphose du rapport politique à la mort. L’évolution des sciences et de l’art médical a bouleversé nos manières de concevoir le terme et la fin de nos existences. Nos communautés politiques réagissent à cela  favorisant de plus en plus l’expansion de l’autonomie décisionnelle des mourants, modifiant ainsi les normes et les lois visant à contenir cette même autonomie. La question centrale est de savoir si cette modification du rapport politique à la mort, apparemment inéluctable, comporte plus d’avantages que d’inconvénients dans le développement de nos sociétés contemporaines. Il s’agit de débusquer les pièges pour mieux cadrer la réflexion portant sur la fin de vie.

Discerner la problématique

Le sujet de la relation de l’homme à sa condition mortelle est trop important pour être mal posé. [...]

 

 

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1  Idée développée par Vico, La Science Nouvelle relative à la Nature commune des nations (1725), tr. fr. Paris, Gallimard, 1993.


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