"Seigneur apprends-nous à prier" Voilà la question des apôtres reprise par les croyants. Le Christ a répondu avec le Notre Père, et avec des paroles de psaumes. Dans les évangiles, les chrétiens peuvent regarder et entendre Jésus prier. Il s'est instauré une tradition spirituelle solide de prière personnelle ou en Église. Interroger d'autres traditions religieuses, par exemple le bouddhisme, n'est pas sombrer dans le syncrétisme, mais rechercher une émulation dans la prière.
Éditorial : Éric de Moulin-Beaufort: Fondements chrétiens de la prière
Thème
Patrick Faure : Le Priant des Psaumes
Les 150 psaumes constituent le trésor de la prière d’Israël, peuple de l’Alliance. La richesse humaine des prières du Psautier mérite d’être recueillie avec attention en tenant compte des différents genres littéraires. C’est cette attention qui permet la lecture christologique et ecclésiale la plus riche de sens.
Thomas Söding: Prier dans l’Esprit
Si le Notre Père tient une place particulière dans la vie liturgique, c’est qu’il est la prière par excellence, celle qui nous a été enseignée par le Christ. Fruit de la prière personnelle de Jésus, enracinée dans celle des Psaumes, il est l’origine et le centre de toute prière chrétienne. En lui sont exprimés tous les aspects de notre relation à Dieu.
Michel Gitton: La Prière du Christ
La prière de Jésus, maintes fois attestée dans les Évangiles, se coule dans les formes de la prière juive mais manifeste aussi une réalité personnelle. Transposition par le Christ, dans son expérience humaine, de ce qu’est sa relation éternelle avec le Père dans la Trinité, elle est la manière concrète où le disciple peut éprouver sa filiation adoptive et entrer dans le jeu trinitaire.
Max Huot de Longchamp: Oraison, méditation, contemplation
Ces mots sont trop souvent confondus. L’étymologie montre que l’oraison est la vocation de l’homme parce que Dieu veut partager avec lui son intimité. Là où les Pères et les médiévaux, dont la vie était entièrement gouvernée par la recherche de Dieu, ne distinguaient que des perceptions superposées de Sa présence, l’époque moderne, depuis l’invention de l’horloge mécanique et de l’imprimerie, détachera des « temps d’oraison », dans lesquels il faudra entrer selon des méthodes précises.
Jean-Pierre Batut: Prier le Père par le Fils dans l’Esprit, Réflexions sur le spécifique de la prière chrétienne
Dans le judaïsme et le christianisme, c’est d’abord Dieu qui cherche l’homme. Ce renversement n’est pas sans incidence sur la manière de prier. L’homme interpellé par Dieu sait qu’une parole originaire précède et suscite la sienne. Et lorsque Dieu vient lui-même, dans le Christ, donner enfin à Dieu la réponse qu’il attend, tout est en place pour que ce dialogue intradivin descendu sur la terre opère notre salut, fasse naître l’Église et transforme ses membres, dans leur prière et dans leur vie, en coopérateurs de l’oeuvre du Fils unique.
Xavier Morales: La prière monastique
La prière monastique n’est autre que le retournement de toute l’existence vers sa source oubliée. Elle n’est donc pas d’abord « oraison mentale », ni même exclusivement prière liturgique. Le plus simple est de «méditer et rouler sans cesse dans son coeur » un verset de l’Écriture. Encore faut-il décrire en quoi consiste cette « simplicité » et surtout la prière naturelle qu’elle suppose.
Jean-Claude Hanus : Adoration eucharistique et compassion
Prolongement et anticipation de la messe, l’adoration eucharistique permet de réaliser ce mystère, de le faire passer dans notre vie la plus profonde. Se mettre sous le regard de Jésus-hostie pour se laisser transformer permet de rejoindre tous ceux qui nous entourent dans une vraie compassion. Celle-ci est un don de Jésus ressuscité aux âmes qui s’unissent à lui dans sa passion : leurs prières, leurs sacrifices, peuvent ainsi être efficaces au-delà des limites de l’espace et du temps.
Solange Thierry: Esquisse d’une histoire de la prière dans le bouddhisme
Certes, la prière n’existe pas dans la doctrine écrite des différents bouddhismes. Mais ne peut-on constater comme une éclosion de la prière bouddhique dans la doctrine vécue ?
Signet
Simon Conway Morris : La boussole de Darwin ou le chant de la création
L’évolution est vraie. Ce qui pose question, c’est une interprétation du darwinisme qui fait des êtres humains de simples accidents, dans un processus ouvert et indéterminé. Or l’étude même de l’évolution contredit cette idée : le progrès des espèces et l’émergence d’états complexes irréversibles sont bien réels. Ceci peut nous éclairer sur la définition et l’émergence de l’humain et offre un grand intérêt théologique. Ce n’est pas la science mais le scientisme qui s’oppose à la religion. La science révèle des profondeurs inattendues dans la Création, et la religion nous indique quelle attitude avoir à cet égard.
Les fondements chrétiens de la prière
Éric de Moulin-Beaufort
«Prier, cʼest une rencontre dʼamour avec le Seigneur, dans la foi, hors du sensible : il mʼaime, je réponds à son amour, cʼest tout simple. Pourquoi prier ? Comme un corps a besoin de respirer lʼair, mon âme a besoin dʼaspirer Dieu»
Soeur Emmanuelle, Panorama, novembre 2008.
Quoi de plus naturel que la prière ? Les enfants prient, presque spontanément. Même dans les cultures qui sembleraient les moins favorables à la prière, les hommes, dans certaines circonstances, en trouvent d’eux-mêmes les chemins1. La mondialisation met les Occidentaux en contacts fréquents avec des hommes pour qui la prière est un accompagnement indispensable de la vie quotidienne. Le rassemblement d’Assise le 27 octobre 1986 a été une manifestation de l’éminente dignité humaine de la prière : le Pape lui-même invitait des représentants de toutes les religions du monde à être ensemble pour prier. Était rendu clair ainsi, qu’à ses yeux, la prière des non-chrétiens n’était pas illusion, ni singerie de la prière chrétienne inspirée par le Malin.
Mais, dans nos sociétés sophistiquées, la prière est devenue une activité rare. Certaine intensité de douleur ou de joie (plus rarement) peut la faire jaillir ; elle n’est cependant plus guère reconnue comme telle. En revanche, chez les chrétiens fervents, des formes multiples de prière se développent depuis quelques temps.
Ce cahier de Communio ne présente pas une phénoménologie de la prière2. À partir de l’exemple de la tradition latine, il réfléchit aux fondements chrétiens de la prière. Son propos se résume aisément : la prière chrétienne est une prière en Jésus. Cela veut dire que la norme de cette prière est la prière de Jésus : prière née de la prière juive, celle des psaumes notamment3 ; prière de Jésus lui-même4 ; prière que Jésus enseigne à ses disciples5, et aussi que cette prière met à nu l’être nouveau reçu dans le baptême : prier, c’est pour le baptisé entrer dans le jeu des Personnes trinitaires6. Ainsi espérance est donnée à toute prière montée du coeur d’un homme, parce qu’il est créature du Dieu Trinité. [...]
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1. Le témoignage final auquel aboutit l’article de Solange Thierry : «Esquisse d’une histoire de la prière dans le bouddhisme » mérite réflexion, p. 93.
2. Cette approche plus philosophique a été suivie, de manière très suggestive, par le cahier germanophone «Das Gebet » 2008-6, de l’Internationale katholische Zeitschrift Communio.
3. Voir Patrick Faure, « Le priant des Psaumes », p. 9.
4. Voir Michel Gitton, « La prière du Christ », p. 33.
5. Voir Thomas Söding, «Prier dans l’Esprit », p. 19.
6. Jean-Pierre Batut développe ce point dans son article : « Prier le Père par le Fils dans l’Esprit. Réflexions sur le spécifique de la prière chrétienne », p. 53.
Simon Conway Morris : La boussole de Darwin ou le chant de la création
L’évolution est vraie. Ce qui pose question, c’est une interprétation du darwinisme qui fait des êtres humains de simples accidents, dans un processus ouvert et indéterminé. Or l’étude même de l’évolution contredit cette idée : le progrès des espèces et l’émergence d’états complexes irréversibles sont bien réels. Ceci peut nous éclairer sur la définition et l’émergence de l’humain et offre un grand intérêt théologique. Ce n’est pas la science mais le scientisme qui s’oppose à la religion. La science révèle des profondeurs inattendues dans la Création, et la religion nous indique quelle attitude avoir à cet égard.
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