Le droit à la liberté religieuse - convergence et équivoques entre l'Eglise et les Etats libéraux.

Le droit à la liberté religieuse a-t-il le même sens pour l'Église et pour l'État ? Si l'on a pu croire à une grande convergence pendant des décennies, les divergences d’interprétation semblent aujourd’hui se multiplier. Elles engagent les fondements anthropologiques de la doctrine des droits.

L’Église a longtemps regardé avec suspicion l’élaboration de la doctrine des droits de l’homme par les sociétés issues de la Révolution française. La pauvreté doctrinale dans laquelle la laisse la période tridentine la rend incapable d’apprécier avec finesse l’affirmation des droits proclamés solennellement en 1789. C’est que s’ouvrent alors des temps nouveaux, marqués par des bouleversements que nul, sans doute, n’avait imaginés et qui laissent les autorités de l’Église, les papes au premier chef, désemparées. Il s’agit de rien de moins que de la fin de la chrétienté, comprise comme un régime de coopération étroite entre autorités temporelles et ecclésiales, qui s’accompagne de la remise en cause du principe monarchique, jusqu’alors compris comme garant de cet ordre de chrétienté. Le corollaire de cette rupture, violemment opérée, est que les sociétés entendent désormais s’édifier sur des bases profanes, sans référence – quand ce n’est pas en opposition – aux vérités issues de la Révélation chrétienne. La proclamation des droits de l’homme et du citoyen, par la Déclaration du 26 août 1789, s’inscrit dans ce contexte et exprime la volonté de fonder la société sur un ordre naturel accessible à la raison commune et non plus sur un ordre surnaturel et révélé. La volonté concomitante de l’Assemblée nationale de retirer à Rome la souveraineté sur l’Église de France, par la Constitution civile du clergé du 12 juillet 1790, rompant unilatéralement le Concordat de 1516, achève de pousser les autorités de l’Église dans une opposition générale et absolue à tout ce qui émane de la Révolution française. Le Bref Quod aliquantum de Pie VI, du 10 mars 1791, condamne sans nuance les prétentions des révolutionnaires et l’affirmation « insensée » d’une « liberté absolue » et d’un « droit monstrueux [...] d’égalité et de liberté naturelle pour tous les hommes ». Ce texte, touffu et désordonné, témoigne de la confusion romaine face aux événements de France et de l’incapacité à en faire une analyse distanciée. Peu après, un nouveau Bref Adeo Nota du 23 avril 1791, condamne « ces droits si contraires à la religion et à la société »

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